1930-1973
Texte écrit par le Professeur A. DUPREZ
Après de brillantes études secondaires et durant de remarquables études à la Faculté de médecine de Nancy, Michel BESSOT est reçu Externe des Hôpitaux en 1951 puis Externe en premier en 1953 et Interne des Hôpitaux en 1955. Après son Internat et son service militaire il passe sa Thèse de Doctorat en 1960, obtient le prix de thèse de chirurgie de la Faculté et devient Chef de Clinique la même année puis Chef de Clinique Assistant des Hôpitaux en 1961 et enfin Professeur Agrégé en 1966. Le Professeur Pierre MATHIEU, un de ses amis chers et son chirurgien lors de sa maladie, se souvient aujourd'hui encore avec une intense émotion de « l'écurie parisienne » que Michel BESSOT avait créée avec Jean Claude Patel pour préparer le concours d'agrégation et à laquelle il lui avait proposé de s'intégrer. Le dynamisme, l'enthousiasme et le souci de l'autre, même concurrent probable ou certain, de Michel BESSOT donnaient au groupe, une convivialité assurant la joie de vivre ensemble. Chacun apportait à tous le meilleur de son savoir et de ses compétences, sans restriction mesquine motivée par un intérêt personnel immédiat. Les uns ont été nommés dès 1966 et tous les autres sont devenus professeur de chirurgie en 1970. Elève des Professeurs BODART et CHALNOT, il a accompli toute sa trop brève carrière professorale à Nancy. Sept ans seulement après sa nomination, une longue maladie qu'il a, en toute connaissance de son évolution, assumée avec un exceptionnel courage, l'emportait le 17 février 1973.
Aux obsèques de BESSOT, le Professeur BODART a dit de son élève : « Le Professeur BESSOT, homme jeune et si riche d'espérance, méritait l'amitié que nous avions tous pour lui. Son intelligence, sa vaste culture, son ardeur et sa ténacité, lui avaient fait choisir un des territoires les plus arides de la pathologie. Malgré les difficultés, il continuait son œuvre avec le même juvénile enthousiasme. Il a vécu jusqu'au bout avec le maximum de dignité et de noblesse. Il a laissé dans l'âme de tous ceux qui l'ont connu un souvenir d'amitié et d'affection ».
Quelques jours avant sa disparition il m'avait demandé de prononcer après son décès une allocution « courte, simple, avec un minimum de référence à nos travaux » devant l'Assemblée de Faculté. J'avais accepté tout en l'assurant que nous avions le temps d'en reparler. J'ai donc suivi ses instructions, le 3 avril 1973, en présentant son éloge funèbre comme il l'avait souhaité : « Dans la bibliothèque du service de Chirurgie B, transformée depuis quelques mois en bureau pour le nouvel agrégé, je venais, comme presque tous les jours depuis trois ans environ, discuter avec Michel BESSOT de cas de malades atteints de cancer dépassés. D'un ton enjoué, qui masquait difficilement une certaine inquiétude, il me demanda avec la spontanéité et la simplicité qui le caractérisaient de l'examiner. Rapidement, nous aboutîmes à la conclusion qu'il fallait entreprendre un bilan qui devait, dès le lendemain, nous révéler le diagnostic de l'affection avec laquelle il fallait désormais survivre. Avec une impassibilité étonnamment construite, il décida de ne rien changer à sa vie journalière. Ses multiples activités chirurgicales et de recherches, fondues en une synthèse harmonieuse, ses nombreuses tâches administratives assumées avec de brillants succès lors des transformations qui suivirent mai 68, donnèrent à tous l'image d'un homme en pleine possession de ses moyens. Il intensifia même l'engagement moral et intellectuel qu'il avait antérieurement décidé de prendre, face aux souffrances morales et physiques des cancéreux parvenus au stade réputé dépassé. Cette foi inébranlable en sa mission ne lui valut pas que des sympathies agissantes ou attentistes. Certaines indications thérapeutiques audacieuses furent considérées comme désinvoltes par des collègues peu perspicaces alors qu'elles résultaient toujours pour chaque malade d'une profonde réflexion associant les considérations morales, personnelles et familiales à l'aspect heuristique et technique. Cette chirurgie d'exception, ultime recours avant la résignation ou le désespoir, procura à un nombre important de patients des survies inespérables sinon inespérées. De temps à autre, au cours d'une discussion de cas difficiles, nous parlions de l'état de sa maladie, toujours présente, mais jamais subie. Malgré les apparences soigneusement entretenues, la pression de la maladie se manifestait avec plus d'acuité et un an durant, pour lui et son épouse, secours permanent depuis le premier jour, le supplice s'intensifia. Sa résignation active, sa foi en la vie, maintenues par des efforts personnels incessants, soutenues par un optimisme, postulat des siens, lui permirent de penser jusqu'à sa dernière hospitalisation que ce 13 février 1973 serait pour beaucoup plus tard ».
Les Doyens de vingt neuf Facultés de médecine ont écrit en leur nom et en celui des chirurgiens et cancérologues de leurs établissements pour faire part de leur profonde tristesse et ont demandé d'en informer sa famille. A lui seul, le nombre de ces lettres retrouvées dans son dossier classé dans les archives de la Faculté de médecine, montre la remarquable reconnaissance de l'oeuvre de Michel BESSOT et de l'énorme estime dont l'entouraient ses pairs. Plus de trois décennies après sa disparition qui me semble encore dater d'hier, l'occasion m'est donnée de transgresser un peu son désir d'humilité en rappelant à grands traits ce que fut son œuvre humaniste et médicale.
Dès 1962, l'Assistant de chirurgie et l'Interne de médecine que nous étions respectivement, ont associé dans une amitié sans la moindre ombre, leurs vies professionnelles de soins, de recherches et d'activités administratives et gestionnaires collectives. Plus qu'une description factuelle, je voudrais rapporter à grands traits ses principaux travaux, en hommage à un homme quotidiennement investi dans les soins aux malades laissés alors par tant d'autres à leur sort désespéré. Ces travaux, facilités par une amitié d'exception et par une confiance réciproque absolue, enrichie par une philosophie commune de la vie traduite dans une pratique professionnelle quotidienne, poursuivie sans relâche malgré sa maladie, ont ouvert des voies thérapeutiques inespérées à l'époque.
Sous la permanente et bienveillante protection de nos Maîtres respectifs les Professeurs BODART, chef du Service de Chirurgie B et KISSEL, chef du Service de Médecine B, les élèves non conformistes que nous étions, ont pu développer avec un infini bonheur et des succès certains, leurs rêves de s'intéresser aux malades atteints de cancers considérés alors comme dépassés pour employer l'euphémisme utilisé à cette époque pour renoncer à tout traitement.
En plus de nombreux travaux anatomo-cliniques de Chirurgie générale, Michel BESSOT a développé trois grands thèmes doctrinaux de cancérologie digestive à applications pratiques immédiates à leurs stades dits dépassés : la cinétique cellulaire in vivo tant à l'état spontané qu'après chimiothérapie, la chimiothérapie anticancéreuse loco-régionale par perfusion sélective, et enfin la synchronisation des proliférations des populations cellulaires des cancers digestifs par des inhibiteurs de la synthèse endogène de la thymidine. Pour la première fois, des études de cinétiques cellulaires in vivo de cancers digestifs humains par incorporation de thymidine tritiée chez les patients, sans leur faire prendre de risques iatrogènes, devenaient techniquement et moralement possibles grâce à des perfusions locales hypersélectives. Entreprise lors d'interventions chirurgicales d'exérèse ou palliatives, l'importance de cette technique et les résultats obtenus furent reconnues dès 1966 par le prestigieux journal Nature de Londres qui publia l'article proposé après quelques corrections mineures de forme. Un autre article fut accepté en 1969 par l'Académie des Sciences de Paris. Les travaux relatifs à la synchronisation ont été publiés dans plusieurs grandes revues dont les Comptes Rendus de l'Académie des sciences en 1966. Enfin les travaux relatifs à la chimiothérapie par perfusion loco-régionale sélective ont valu à Michel BESSOT d'être lauréat de l'Académie Nationale de Chirurgie. Tous ces travaux soutenus par les Professeurs Jean Bernard et Jacques Delarue et reconnus par la communauté scientifique internationale ont permis à Michel BESSOT d'obtenir d'importants contrats de recherches de L'INSERM de 1967 à 1971 dans le groupe « Cancer et Leucémie ». Au total 46 publications, dont un livre intitulé « la chimiothérapie régionale des cancers digestifs » édité par Masson, et plusieurs thèses de médecine sont issues de ses travaux.
Quelques décennies avant que la médecine ne soit enfin en partie régie par des règles de bioéthique, tous les travaux expérimentaux de Michel BESSOT, d'une grande rigueur scientifique ont, parce qu'entrepris in vivo chez l'homme, été soumis à des réflexions morales strictes tant pour le malade que pour son éventuelle descendance puisque des isotopes radioactifs étaient utilisés. Cette préoccupation constante du malade comme personne humaine, le souci permanent de son information complète et le scrupuleux respect de sa liberté individuelle ont toujours guidé les activités de soins et de recherches fondamentales et appliquées de Michel BESSOT. La clinique comme inspiratrice et objectif d'une recherche pour le malade, quel que soit son état et plus encore lorsque celui-ci conduisait au désespoir par la prise de conscience de l'abandon à la fatalité, tel était l'humanisme que s'imposait Michel BESSOT.
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Marie-Thérèse BESSOT
Avec le décès du Dr Marie-Thérèse Bessot, survenu samedi 14 janvier 2006, à l'âge de 79 ans, c'est une figure marquante de la réadaptation infantile qui disparaît. Marie-Thérèse Saur était née le 2 mai 1926. Elle a fait ses études de médecine à Nancy, où elle soutient sa thèse de médecine en 1955. A la suite d'un stage au « Children's Hospital », à Washington, elle décide de s'orienter vers la médecine infantile.
En 1957, elle obtient une attestation de puériculture puis se spécialise en pédiatrie dans le service du professeur Lelong, à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul, à Paris. Elle devient attachée de consultations à l'Ecole de puériculture de Paris et médecin-inspecteur scolaire dans la région parisienne.
En 1960, elle intègre, à Nancy, l'Institut régional de réadaptation, où elle est chargée, en particulier, de la rééducation des enfants poliomyélitiques à l'hôpital Maringer et de la rééducation respiratoire, notamment des tuberculeux. En 1961, elle prend la direction de la section hospitalière regroupant des services de rééducation pour enfants au
CHU de Nancy et à la Maternité régionale de Nancy.
C'est à elle que revient la responsabilité de créer, à l'ouverture de l'hôpital d'enfants en 1982, le service de réadaptation, où elle organise plus particulièrement la rééducation des nourrissons atteints d'affection respiratoire et des enfants brûlés.
Durant toute sa carrière médicale, jusqu'à son départ en retraite le 1er janvier 1991, Marie-Thérèse Bessot développe une activité particulière pour la rééducation et l'appareillage des enfants présentant des malformations des membres.
Outre son dévouement pour les enfants handicapés auxquels elle consacra sa vie et pendant plus de trente ans son activité médicale, le docteur Bessot était à la fois attentive, déterminée et compétente. Avec son mari, le professeur Michel Bessot, chirurgien oncologue, décédé en 1973, elle partageait le rejet de la fatalité et le refus du renoncement à l'égard des plus éplorés.
Elle avait trois enfants.
Ses obsèques seront célébrées dans l'intimité familiale.
Nos condoléances.