AU TEMPS DE LA RENAISSANCE, LA PHTISIE A LA COUR DE LORRAINE
Jacqueline CAROLUS
Il est difficile d’apprécier l’importance de la phtisie1 à la Renaissance,
à l’exception de la tuberculose ganglionnaire cervicale, donnant ce qu’on
appelait les « scrofules » ou écrouelles. André du Laurens, médecin d’Henri IV,
précise, dans son Traité des écrouelles, que la maladie est fréquente,
sans plus. Sydenham (1685) estime qu’elle est responsable du décès des
deux-tiers de ceux qui meurent de maladie chronique. Bariéty
et Coury, dans leur Histoire de la médecine
(1963), considèrent, qu’au XVIIe siècle, 20 % des décès sont dus à la
consomption pulmonaire. La phtisie, qu’on appellera tuberculose au XIXe siècle
seulement, est donc fréquente. Et pourtant la Renaissance aurait dû marquer une
étape importante dans l’histoire de la tuberculose : c’est au début du XVIe siècle,
que Frascator qualifie la phtisie de contagieuse et
exige contre elle des mesures aussi sévères que contre la peste et la syphilis.
Il ne sera malheureusement pas suivi.
Quand elle est évoquée, on soigne la phtisie par des
saignées copieuses et fréquentes pour éliminer « le poison », des
cautérisations pour l’extraire, des ventouses scarifiées et des vésicatoires ;
on soulage la toux par des « syrops » et on
administre des fortifiants sous forme de potions cordiales. Sous l’influence de
Paracelse, la médecine chimique, encore bien proche de l’alchimie, commence à
se développer : on va préconiser l’or, l’argent, le cuivre, le fer …
Les ducs de Lorraine et leurs épouses ont la réputation
d’être goutteux, lithiasiques et pléthoriques, cependant certains d’entre eux
ont échappé à la règle et sont morts de phtisie plutôt que d’accident
vasculaire cérébral.
Faute de renseignements suffisants, nous ne nous
attarderons pas sur le sort de Jeanne d’Harcourt, duchesse de Lorraine,
épouse répudiée de René II. Jeanne d’Harcourt, comtesse de Tancarville, Dame de
Montreuil-Bellay, fille de Guillaume d’Harcourt et de Yolande de Laval avait
épousé René de Vaudémont, le 9 septembre 1471. Chétive, bossue et contrefaite,
atteinte d’un vraissemblable mal de Pott, elle
inspire sitôt le mariage conclu, dégoût et désir de répudiation à René.
Celui-ci devenu duc, demande rapidement la dissolution de ce mariage à
l’Official de Toul, tandis que la jeune femme se retire en août 1477, dans sa
famille, en Normandie. La décision du pape Innocent VIII est connue en 1485,
alors que René vient d’épouser Philippe de Gueldre. La pauvre duchesse répudiée
meurt bien jeune, le 4 novembre 1488.
Il est difficile de porter un diagnostic certain sur la
maladie du duc François, qui meurt âgé de 27 ans, à la suite d’une hémoptysie.
Il venait d’épouser Chrestienne de Danemark, nièce de
Charles-Quint, à Bruxelles, le 10 juillet 1541. Devenu duc à la mort d’Antoine,
il se rendait à Epernay pour rencontrer le roi François Ier, quand il fut pris d’une
« violente colique accompagnée d’apoplexie »2 qui le mit hors d’état de poursuivre ses
négociations. Vers Pâques, se sentant plus mal, il doit aller se reposer à
Blâmont où sa santé se dégrade de jour en jour. Sur les conseils de ses
médecins Symphorien Champier, Antoine Lepois et d’autres qu’on fait venir de Strasbourg, il se
fait conduire à Remiremont pour prendre les eaux chaudes de Plombières dans une
chaise à bras, ne pouvant supporter d’être véhiculé en litière. Pendant
plusieurs jours, jusqu’à la Fête-Dieu, on lui apporte des tonneaux d’eau chaude
de Plombières dans lesquels on le baigne. Malgré ces soins attentifs, l’état du
duc s’aggrave, il réussit à dicter son testament et à recevoir les sacrements
de l’église, puis décède « au cours d’une hémoptysie », à Remiremont, le
vendredi 12 juin 1545. Il avait vingt-sept ans.
Les sources sont, par contre, suffisamment claires pour
qu’il soit possible d’affirmer que Claude de France, duchesse de Lorraine,
épouse de Charles III et sa bru, Catherine de Bourbon, duchesse de Bar, étaient
phtisiques.
Claude de France, troisième enfant et
deuxième fille d’Henri II et de Catherine de Médicis naît à Fontainebleau, le
12 novembre 1547 « aux sept heures du matin ». La reine était en travail
«depuis quatre heures de la minuit ». Catherine vit à peine sa fille. On
présenta l’enfant à son père et à Diane de Poitiers, la maîtresse royale.
Celle-ci l’emporta et fit comme pour les autres enfants royaux. Elle se
chargeait de les faire élever et de les éduquer. Madame d’Humières,
la gouvernante, avait une expérience incomparable des petits enfants (coliques,
toux, dévoiements … rien ne la prenait au dépourvu !). La petite Claude a des
antécédents chargés. Elle porte la fragilité des derniers Valois comme ses
frères qui vont s’éteindre lamentablement : son frère aîné, François II meurt à
vingt ans dans des flots de pus, d’une mastoïdite suppurée avec évolution
méningée. C’est une tuberculose pulmonaire évolutive qui emporte Charles IX.
Henri III, quant à lui, présente une fistule suppurée chronique de l’angle
interne de l’œil qu’on avait cru guérir en créant « une fontaine dans le creux
axillaire » ! Une mort violente (coup de couteau dans le ventre et perforation
intestinale) le sauvera de l’infection faciale pour le précipiter dans la
péritonite … Quant au cadet, le duc d’Anjou, il est atteint d’une phtisie que
ses débauches, dit-on, font galoper. Bref tous les enfants de Catherine sont de
santé fragile, instables, minés de tuberculose, sujets à des accès de fièvre.
Dans ces châteaux lugubres, où ils vivent en troupe, on ignore la vie au grand
air, l’hygiène élémentaire et les bienfaits du soleil. On prétend qu’Henri II,
le père, gravement marqué par sa captivité en Espagne quand il était enfant, en
était revenu tuberculeux. Ainsi, les enfants royaux, contaminés en famille,
sont en mauvaise santé et, tous chétifs, toussent à qui mieux mieux.
L’infortunée princesse fut donc malade durant toute sa
courte vie. A quatre mois, premier handicap, il fallut la sevrer « à cause
d’une maladie de sa nourrice Marie Perrin, maladie qui lui avait fait perdre le
tétyn » ! La rétraction du mamelon empêchait la
tétée. On dut mettre la petite « au régime de la panade », régime qui va
entraîner, on l’imagine, d’importants troubles digestifs et des carences, ne
favorisant pas la croissance. A l’âge de quatre ans, la petite Claude, bien
frêle, est sérieusement souffrante. « J’ai vu par la lettre que vous m’avez
mandée que Madame Claude s’est trouvée mal cette nuit de sa toux » écrit
Diane de Poitiers « toutefois, c’est une maladie qui n’est point dangereuse,
vu que Madame sa sœur aînée en a eu de cette façon ». Puis le rachitisme
est responsable d’une scoliose pour laquelle «l’opérateur » fait fabriquer un
corset de fer, destiné à lui redresser le buste. Elle en portera « des corps
» toute sa vie.
Claude n’a que onze ans et deux mois quand elle épouse
Charles de Lorraine, le 22 janvier 1559. Les mariés sont bien jeunes ! Cinq ans
plus tard, Claude, toujours fragile, met son premier-né au monde (le futur duc
Henri). Les grossesses vont se succéder rapidement puisqu’en 1573, la petite
duchesse, âgée de 23 ans a mis six enfants au monde. Le 15 novembre 1573, avec
une suite imposante, Catherine de Médicis et sa Cour, accompagnant Henri, duc
d’Anjou qui vient d’être élu roi par la diète de Pologne, débarque à Nancy. La
Cour accompagne Henri jusqu’à Blâmont. Mais Claude n’est pas de la promenade,
fébrile, alitée, elle vient d’accoucher de son septième enfant, une fille
Catherine. Les comptes du duché sont émaillés de faits qui soulignent sa
mauvaise santé, « A un muletier de Milan, la somme de vingt écus pistolles pour paiement de son salaire ayant amené dudit
Milan en ce lieu avec trois mulets les eaues pour les
bains de saditte altesse ensemble oranges, citrons et
autres choses que le tresorier dudit Milan envoie à
Madame». La duchesse doit souvent s’aliter et on appelle, le pauvre Nicolas
Le Pois n’y suffisant plus, de nombreux médecins à son chevet : Hanus3 de Metz, Tartier de
Sainte-Marie, le sieur Goris de Sedan. La duchesse
est tellement fatiguée et voilà qu’en 1574, elle est de nouveau enceinte. C’est
une gémellaire … Après avoir employé Geneviève Hulas,
sage-femme parisienne, puis Elisabeth Beaudouin pour les grossesses
précédentes, Madame fait venir à son chevet une sage-femme de Paris, dont on ne
connaît pas le nom, mais que Brantôme traite sévèrement «la duchesse mourut
en mal d’enfant, à l’appétit d’une sage-femme et grosse yvrognesse
de Paris en laquelle elle avait plus fiance qu’en toute autre », le 20
février 1575, « au palais ducal, à trois heures après minuit, ladicte dame Claude fut délivrée de deux belles filles ».
Les suites de l’accouchement se passent mal, on appelle en urgence une
sage-femme de Void (?), et aussi Maîtres Hanus et Thouard et pour certains,
Ambroise Paré. Ils ne sont d’aucun secours et la pauvre duchesse, épuisée,
meurt le lendemain, d’une vraissemblable hémorragie incontrolée. Elle avait 27 ans.
Catherine de Bourbon est la sœur d’Henri IV,
que pour des raisons politiques, et après une longue résistance de sa part, on
marie à l’héritier de Lorraine : Henri, duc de Bar. Fille de Jeanne d’Albret,
la princesse est chétive, de petite taille, et son corps douloureux est marqué
dès l’enfance par la tuberculose qui emporte sa mère. En effet, sa mère, Jeanne
d’Albret, malgré des cures aux Eaux-Chaudes, crache le sang durant toute sa
courte vie ce qui ne l’empêche pas de
régner avec fermeté sur son royaume de Navarre. Catherine « sujette
fréquemment aux fièvres et aux rhumes », est atteinte en outre d’une forte
claudication. En 1572, la jeune Catherine accompagne sa mère, Jeanne d’Albret,
à Paris. On vient préparer les noces d’Henri (futur Henri IV) avec Marguerite
de Valois, fille de Catherine de Médicis. C’est à Paris que Jeanne meurt le 9
juin 15724. Catherine n’a que
quatorze ans, mais calviniste convaincue, elle prend la relève de sa mère,
figure de proue du calvinisme français.
Devenu roi de France, Henri charge Catherine du gouvernement des
royaumes d’Albret, du Béarn et de la Navarre. Ses « maux de poitrine » qu’on
traite régulièrement aux Eaux-Chaudes, n’entravent pas son activité. C’est un
beau parti, mais elle refuse régulièrement les prétendants qu’on lui propose. Les
années passent, Catherine vieillit et finalement, c’est un ultimatum, son frère
lui donne le choix entre Montpensier et le prince Henri de Lorraine. Elle a
maintenant trente neuf ans, elle est en très mauvaise
santé ; ses médecins lui prescrivent des traitements inhabituels pour l’époque
: bains quotidiens, poudre de licorne et grains de bézoar.
Catherine pour masquer sa pâleur est toujours outrageusement fardée. Le
préalable au mariage avec le duc de Lorraine, c’est la conversion de la
princesse inflexible à la religion catholique. Catherine ne cède pas et le
contrat fixant les clauses de cette union est signé le 13 juillet 1598.
Le 29 décembre 1598, Clément VIII déclare qu’il est
opposé à cette union si Catherine reste huguenote. Henri IV brusque les choses
et le mariage est célébré « à la hussarde », à Saint-Germain en Laye, le 31
janvier 1599. Henri de Lorraine craint l’excommunication. Catherine arrive à
Nancy où des « disputes théologiques » sont organisées pour la faire fléchir.
Une controverse a lieu, à la Malgrange, le 13
novembre 1599, entre le père Commolet, jésuite, le
pasteur Couet, venu de Bâle et une autre célébrité du
calvinisme, le sieur Dominique de Losse, controverse
à laquelle Catherine assiste, mais qui n’ébranle pas ses convictions. De son
côté, Henri de Lorraine, excommunié, multiplie les démarches afin d’obtenir du
Pape la dispense nécessaire à la validité de son mariage. Il cesse alors la vie
commune avec Catherine qui se retire à La Malgrange
de décembre 1599 à février 1600. La séparation des époux devient publique.
Henri passe l’année en Italie. En juillet, l’excommunication est levée, Henri
est absous pour le passé, mais doit obtenir la dispense pour consanguinité et
la « catolisation » de son épouse.
La santé de la princesse, de plus en plus chancelante,
l’oblige à limiter ses activités. Catherine présente régulièrement des périodes
de toux s’accompagnant de fièvre. On parle parfois de pleurésie. Les hôtes de
la cour de Lorraine en témoignent. Ainsi en août 1599, l’infante Isabelle,
gouverneur des Pays-Bas espagnols, fille de Philippe II d’Espagne, est en
visite à Nancy. L’infante a laissé de son passage à Nancy une description
manuscrite qui ne manque pas de sel : « les réceptions à la cour de Lorraine
sont magnifiques, mais à table, pour ne pas déplaire à Catherine de Bourbon,
pas de bénédicité » ! La duchesse, malade, ne participe pas aux
réjouissances et on se rend dans sa chambre pour faire de la musique. Catherine
chante bien, quoique sa voix soit cassée. L’infante précise qu’elle est retenue
dans sa chambre par une fausse-couche, « elle en a tous les huit jours »
! Catherine qui voudrait tellement donner un héritier à la Lorraine, s’en
persuade. Il s’agit sans aucun doute des manifestations pelviennes de la
péritonite tuberculeuse qui l’emportera. Dans une lettre à son frère, elle
écrit « je suis à demy morte de la fièvre qui m’a
tenue durant que l’infante étoit icy…
». Ses douleurs abdominales sont telles que l’apothicaire doit prescrire
des emplâtres opiacés et de la « thériac fine de Venize5 » pour la soulager. Une crise particulièrement
grave au début de 1601 est étiquetée : «catarrhe universel » ; on baptise ses
malaises « fièvre continue ardente», « feu hépatique », « ébranlement des
parties nobles », tous ces errements montrant bien que le diagnostic n’est pas
établi. Son frère, le roi, lui envoie son médecin du Laurens. Mais c’est grâce
au pasteur Yoland venu de Vitry-le-François qu’elle
fait - prétendument - « battre la mort en retraite ». De juillet à octobre,
apparemment rétablie, elle est à la cour de France pour assister à la naissance
du Dauphin.
A l’exception de deux voyages à Paris (juillet à novembre
1601 et juillet-août 1603), Catherine ne se déplace plus que dans un périmètre
restreint : Lunéville, Pont-à-Mousson, Bar-le-Duc. En 1602, Catherine prépare
au palais, les fêtes du Carnaval ; elle y participe mais tombe malade au
printemps, et de nouveau en octobre. L’hiver est sévère, les gelées et
brouillards nombreux, la duchesse fait une nouvelle pleurésie dont elle guérit.
Est-ce grâce à la poudre d’or que l’on mêle à sa viande6 ? Charles III
soucieux de la santé de sa bru, l’emmène avec lui faire une cure à Plombières
du 18 mai au 26 juin 1602 ; une terrible rage de dents avec fluxion gâche la
fin du séjour : l’apothicaire, qui est du voyage, prescrit d’abord ce qui
convient à une curiste raffinée : « le suc de deux citrons pour boire dedans
le bain », « de la cannelle en poudre pour aromatiser l’eau chaude du
bain ». A partir du 13 juin, il fournit de la poudre et des emplâtres pour
les dents, puis la joue gonfle, il faut appliquer « une fomentation sèche
sur l’aureil », des gouttes dans «l’aureil », un cataplasme sur la joue, des gargarismes …
Durant l’été 1603, la duchesse s’affaiblit, la fièvre la mine. Mais Catherine
est heureuse, elle se croit enceinte. Le prévôt de l’Hôtel du duc de Bar va
chercher « en charrette » une sage-femme de Besançon, dame Isabeau de La
Vallée. Isabeau lui concocte quelques drogues « chaudes et fortes » auxquelles
elle mêle des fils de soie rouge ! La dame séjourne « deux mois et plus près
de maditte Dame ». On lui paye pour ses gages,
bien que le résultat ne soit
pas évident, « six vingt six et cent sept francs7 »
.
A l’automne 1603, Catherine est très fatiguée, son état s’aggrave.
Charles III envoie chercher à Pont-à-Mousson son propre médecin Charles le
Pois. On fait venir également le sieur Rouyer,
médecin à Metz. Mais Catherine n’a confiance qu’en maître Louys,
médecin de Metz « qui est de la religion » ! Ce dernier la persuade qu’elle est
enceinte de trois mois … A Noël, quel bonheur ! le
ventre de Madame s’arrondit, on annonce la grossesse de la duchesse de Bar dans
toutes les gazettes. Le médecin huguenot Louys a
toujours la confiance de Catherine, il est « pour la grossesse ». Il fait
acheter deux sequins de Turquie pour « convertir en limaille et poudre d’or
à mêler à la viande de Madame à servir à sa santé » ! Catherine souffre de
plus en plus de l’abdomen, au point de tomber en syncope, son visage s’est
amaigri, elle est bien fatiguée, mais résiste de toutes ses forces et ne
poursuit qu’un but : « mettre au monde son petit page ». Plus son état
devient grave, moins elle paraît s’en soucier, toute à l’espérance d’être mère.
L’apothicaire s’affole, confectionne quotidiennement potions cordiales, bouillons apéritifs, « opiatte8 cordiale et stomachale»,
« mirobolam9 » … Il faut rappeler madame
Isabeau, on mange à nouveau de l’or râpé … Henri IV, de son côté envoie du
Laurens, son médecin. Celui-ci n’est pas d’accord, Madame n’est pas enceinte,
il s’agit d’une inflammation de la matrice. Mais Catherine n’a confiance qu’en Louys, qui est protestant, et refuse les médications de du
Laurens. La duchesse délire … « Sauvez mon fruit » répète-t-elle.
Malheureusement Catherine s’affaiblit davantage, chaque fois qu’elle tombe en
syncope, elle semble rendre l’âme. A bout de forces, répétant encore « sauvez
mon fruit », Madame étouffe, suffoque, une toux incessante accompagnée de
douleurs thoraciques ajoute de nouvelles souffrances. Puis elle perd
connaissance et meurt le 13 février 1604. On avait renvoyé tous les médecins
incapables, du Laurens, Hotritte (?) de Strasbourg et
Louys, le protestant de Metz contre lequel Charles
III avait fait éclater sa colère.
Du Laurens revint pratiquer l’autopsie, infirmer la
grossesse et confirmer les pleurésie et péritonite
tuberculeuses10. Louys,
le médecin protestant, qui ne se sentait pas en sécurité à Metz, se réfugia à
Sedan, ville protestante du duc de Bouillon.
La mort de la duchesse de Bar frappa ses contemporains «
d’autant qu’on l’avait cru grosse ». Mais les Lorrains, de tous temps fort
attachés à la religion, ne témoigneront pas autrement de douleur à sa mort. On
exposa le corps embaumé de la princesse au palais ducal, puis on le rendit à la
France (on n'allait pas enterrer une huguenote avec les princes lorrains).
Henri IV se pressa de récupérer les bijoux, d’incorporer les terres de Béarn et
de Navarre à la couronne de France … et le veuf, qui va devenir le duc Henri de
Lorraine à la mort de Charles III, se remarie avec une catholique bien
portante, Marguerite de Gonzague.
1 Du grec : consomption
2 Dom Calmet, t. V, p. 636.
3 Il pourrait s'agir du célèbre Anus Föes
4 L'autopsie que Jeanne avait demandée pour qu'on
connaisse l'origine de ses incessants maux de tête, montre une énorme caverne
tuberculeuse et un envahissement méningé
5 Préparation composée d'une soixantaine de plantes y
compris de suc de pavot, utilisée comme antidote, antalgique, ... Thérapeutique
de choc universelle ! Composée par le médecin de Néron, la thériaque sera
prescrite pendant dix-huit siècles
6 ADMM B 1279 :11 francs 4 gros employés à l'achat de 2
sequins de Turquie qui ont été délivrés pour convertir en imaille
et poudre d'or "à mesler à la viande de Madame
pour servir à sa santé"
7 ADMM B 1279
8 Opîat : électuaire contenant
de l'opium
9 Mirobolom : astringent et laxatif
doux
10 ADMM B 1281 : 1.500 francs au Sr du Laurens, médecin pour
ses soins à feu Madame, 371 francs à Hotritte de
Strasbourg, médecin, pour la peine et les soins qu'il a pris de traiter Madame.