1809-1878
ELOGE FUNEBRE
Professeur de clinique médicale à la Faculté de Strasbourg, M. Hirtz avait été un des représentants les plus éminents de cette école qu'ont fermée nos désastres. Personne n'a oublié l'éclat de son enseignement clinique, qui a formé tant de jeunes médecins ; dirigés par une méthode sûre, exercés avec patience à l'exploration médicale, les élèves admiraient le savoir et la pénétration de leur maître, la sûreté de son diagnostic, les ressources de sa thérapeutique dans les cas en apparence les plus désespérés. Une parole claire et facile, une grande bonhomie mêlée à beaucoup de sens et de finesse, donnaient un attrait particulier à ses leçons. Professeur habile et praticien très répandu, M. Hirtz joignait le mérite du médecin d'hôpital à l'expérience et à l'autorité que donnent une clientèle nombreuse. Médecin expérimenté et ingénieux, toujours au courant des progrès de la science, possédant toutes les ressources du diagnostic moderne, il excellait dans l'art d'explorer avec précision, d'interroger avec méthode, de pénétrer les secrets de l'organisme au milieu des symptômes les plus obscurs. La promptitude de son coup d'oeil, la sûreté de son jugement, son caractère aimable et sympathique, lui donnaient une singulière autorité sur ses élèves comme sur ses malades. Il savait se faire des amis et les conserver; sa cordiale obligeance, son dévouement n'étaient jamais invoqués en vain.
M. Hirtz avait porté dans la science la même activité d'esprit, le même sens droit que dans l'exercice de son art ; son art lui faisait découvrir les questions utiles et nouvelles, celles qui devaient le plus attirer l'attention, et il les traitait avec un incontestable talent. Nous ne pouvons pas rappeler ici ses importantes recherches sur la température dans les maladies, sur le diagnostic des affections de poitrine, sur divers agents thérapeutiques, ses études sur les théories médicales, travaux qui avaient tous un caractère d'originalité et d'opportunité. Quand, à la suite de nos malheurs, la Faculté de Strasbourg fut transférée à Nancy, M. Hirtz abandonna avec un profond regret sa terre natale. Il rouvrit à Nancy son enseignement, qui eut encore un moment d'éclat; mais ici ses forces trahirent son courage, il dut renoncer à cette clinique qui lui était si chère et où de nouveaux succès l'attendaient ; la Faculté de Nancy perdit bientôt son utile concours.
Se séparant avec regret de ses collègues, M. Hirtz alla s'établir à Paris; c'est une courte et dernière phase de sa carrière, où les distinctions méritées ne lui manquèrent pas. Sa réputation de praticien et de savant lui donna presque aussitôt une haute position médicale ; l'Académie de médecine lui ouvrit ses rangs ; il retrouva presque malgré lui une nombreuse clientèle, digne de son talent et de son expérience. La sympathie qui s'attachait aux malheurs de l'Alsace, comme il le remarquait lui-même, augmentait cette notoriété. M. Hirtz a rempli jusqu'à la fin de sa carrière ses devoirs de médecin; il avait besoin de cette activité intellectuelle, et il aimait sa profession; bienveillant et dévoué, il disputait au mal qui le minait quelques dernières heures pour les consacrer à ses compatriotes, à des clients qui venaient encore lui demander un conseil. Il ne se faisait pas illusion sur sa fin prochaine, qu'il envisageait non sans douleur, mais avec résignation, entouré des soins d'une famille dévouée. Notre École, la colonie alsacienne, le corps médical font en lui une perte sensible. La Revue médicale de l'Est, avant une étude plus complète de cette vie utile, devait à ce membre si distingué de notre ancienne Faculté de Strasbourg, ce premier témoignage d'affection et de regrets.