L’ECOLE
LIBRE DE MEDECINE DE NANCY (1793-1822)
Jean FLOQUET
Les Sociétés de Santé furent
une des réponses, non officielles, à la désorganisation de l’enseignement de la
médecine et de la chirurgie dans les années qui suivirent la Révolution en France.
Elles voulaient suppléer l’insuffisance numérique de la formation offerte par
les Écoles de Santé de Paris, Montpellier et Strasbourg, créées
en 1794.
A Nancy, une Société de Santé
a ainsi existé (1796-1806), mais elle a été précédée et accompagnée par
d’autres tentatives, en particulier par une École Libre de Médecine qui
sera ensuite à l’origine de l’École Secondaire de Médecine, seule
responsable de l’enseignement médical de 1822 à 1872.
Alors que les archives de la
faculté sont muettes sur les étudiants qui ont fréquenté la Société de Santé,
elles nous permettent de consulter les contrats qui ont lié les professeurs,
les parents et les étudiants de l’École Libre de 1793 à 1822. Ces
contrats sont établis par Jean-Baptiste Simonin
(1750-1836) jusque 1809, date à laquelle le nombre des étudiants augmente de
façon significative. Il nous est impossible toutefois d’assurer que l’ensemble
des contrats a été conservé.
Les enseignants : A partir de 1810, Charles Nicolas de Haldat
du Lys (1769-1853) et Jean-Baptiste Simonin fils
(1785-1870) participent à la signature au côté de Jean-Baptiste Simonin père. Les noms de Sébastien Serrières (1776-1836)
et François Bonfils (1769-1851) sont mentionnés sur
la page de garde de la liasse qui renferme ces documents, mais leur signature n’apparaît
jamais sur l’ensemble des documents examinés.
Les contrats ont peu évolué au cours des années. Signés jusqu’en 1810
par Jean-Baptiste Simonin (père), qui est désigné
sous des appellations variables “chirurgien des hospices, chirurgien juré et
stipendié de Nancy, professeur d’anatomie“, ils sont ensuite libellés au nom
des “professeurs en médecine et chirurgie” sans autre précision que les
signatures déjà mentionnées. Ils donnent des renseignements sur l’origine
sociale et l’âge des étudiants.
D’une durée de deux ans, ils
entraînent le paiement par les parents ou tuteurs d’une somme totale de 600
francs, souvent versée en deux ou plusieurs fois. L’absence de règlement
entraîne l’arrêt de la formation ; par contre, l’arrêt de son stage par
l’étudiant lui-même ne donne lieu à aucun remboursement de la part des
enseignants. La répartition des sommes perçues n’est précisée que pour Simonin père et De Haldat. Ce
contrat engage le ou les professeurs à donner un enseignement médico-chirurgical qui est essentiellement pratique. Les
étudiants n’ont pas la possibilité de suivre l’enseignement d’un autre maître
pendant la durée du contrat..
Nous ferons quelques commentaires
qui concernent les étudiants. Leur nombre est habituellement peu important,
avec même des années où aucune inscription n’est notée (1794 à 1796 ; 1800 à
1804 ; 1814 à 1816 ; 1819 ; 1821). Cependant, à trois reprises, ce nombre
augmente de façon très importante, sans que nous ayons d’explication à ce fait
: 1809, 13 étudiants, 1812, 17 et 1813, 11. Ceux-ci sont, bien sûr,
exclusivement de jeunes hommes de 14 à 20 ans, l’âge ayant une légère tendance
à croître avec le temps.
Ils sont pour la grande majorité
d’origine Lorraine et tout particulièrement de Nancy. Ils sont issus de milieux
divers, aisés semble-t-il, avec de nombreuses familles “d’hommes de loi” ou
encore de “négociants”. La plupart d’entre eux vont suivre l’enseignement de
façon assidue. Cependant l’un d’eux doit arrêter son stage pour “conscription”
; deux autres sont éliminés pour insolvabilité familiale.
Que sont devenus ces nombreux
“étudiants” ? Le titre auquel ils ont eu
droit n’est nulle part évoqué. Aucune forme particulière d’examen n’est
signalée. Il leur était remis un certificat
... Celui-ci était-il suffisant
pour qu’ils viennent étoffer le corps des “officiers de santé”, cadre
d’exercice de la médecine reconnu à cette époque à côté des docteurs
en médecine ?...
En 1822, cette école de médecine
cesse son activité et fait place à l’École Secondaire qui deviendra, en
1843, Ecole Préparatoire de Médecine et de Pharmacie, préfigurant les futures facultés.