FLOQUET Jean

1933-2024

` sommaire

ELOGE par le docteur Jacques VADOT

Hommage à Jean FLOQUET Le professeur, le conservateur du musée, l'ami

Jean Floquet, un ami de longtemps et toujours

Texte (ainsi que le suivant) publié dans La Lettre du Musée (no 112 – printemps 2025)

Il me paraît difficile de fixer une date précise de rencontre. Jean FLOQUET était dans une année universitaire au-dessus de moi.

En PCB (certificat de physique, chimie et biologie) en Faculté des sciences, qui était une année préparatoire et de sélection pour la médecine, j'ai dû être avec Andrée Gassiole, la future épouse de Jean. Cette 1 ère année universitaire ne nous a pas laissé de souvenir précis, car les cours se déroulaient entre la rue Sainte-Catherine (où des étudiants téméraires, dont j'étais, traversèrent le canal gelé au cours d'un hiver 53-54 très rigoureux !) et le quartier de la Porte de la Craffe.

C'est en première année de médecine, lors de réunions au G.E.C. (Groupe des Etudiants Catholiques), situé Cours Léopold, que nous avons fait connaissance. Dans ce « Foyer étudiant », dirigé par des jésuites (les Pères Noir et Frison), se déroulaient d'intéressantes conférences ... et les « Revues de l'Internat ». Il y avait une grande chapelle qui permettait de se retrouver pour prier. Les étudiants en médecine bénéficiaient aussi de l'accompagnement d'un Dominicain, le Père Chauvat.

En dehors de Nancy, à Millery, le long de la Moselle, on se retrouvait pour des journées de réflexion. Des « Pèlerinages étudiants » à Sion facilitaient aussi ces moments de prière. C'est dans toutes ces activités que nous nous rencontrions avec Jean et Andrée et d'autres amis, et cela aura certainement marqué nos vies de façon définitive. En ces premières années de médecine, Andrée Gassiole avait retrouvé une amie de lycée, Monique qui, très jeune, épousa un certain Georges GRIGNON dont la carrière fut très riche, variée et active. Jean FLOQUET s'investissait en « anatomo-pathologie » sous la houlette de Guy RAUBER, puis de Georges GRIGNON.

De mon côté, c'est en anatomie sous la conduite du professeur Antoine BEAU que je franchissais quelques échelons universitaires, parallèlement à ma formation dermatologique auprès du professeur Jean BEUREY.

Nos vies familiales et professionnelles nous éloignèrent quelque temps..., puis les circonstances de la vie favorisèrent une nouvelle rencontre.

Au décès du Professeur BEAU (1996), qui avait créé avec Gilbert PERCEBOIS un premier Musée de la Médecine rue Lionnois, très « confidentiel », j'ai contacté Madame Beau, lui demandant comment je pouvais m'investir dans cette structure. Elle me conseille de rencontrer le Professeur Georges GRIGNON qui en était le responsable. Ce fut rapidement fait ! C'est alors que, dès la fin de l'année 1996, avec Georges GRIGNON et Jean FLOQUET que je retrouvai, nous décidons de constituer une Association des Amis du Musée de la Faculté de Médecine de Nancy, dont la première initiative a été de réaliser, au printemps 1997, une exposition dans le hall du Conseil général, mis à notre disposition par le Président Jacques Baudot, un ami du lycée Henri-Poincaré que je revoyais avec plaisir. Mais ce fut son directeur de cabinet, Louis Poirel, qui fut notre interlocuteur. Colonel à la retraite, je le reverrai plus tard au sein d'une association de réinsertion. Avec l'appui des services audiovisuels de la faculté, nous réalisons des posters explicatifs accompagnant quelques tableaux, à la grande satisfaction de nos nombreux visiteurs.

Un premier conseil d'administration est constitué, avec quelques universitaires, dont le Professeur Claude PERRIN (ORL), une jeune conservatrice des musées et beaux-arts, Marie Gloc-Dechezleprêtre, et plusieurs bonnes volontés, dont un médecin de l'hôpital militaire Legouest de Metz, le commandant Eric Salf. On me confie la présidence. Georges Grignon, qui était le conservateur des collections, succédant au Professeur Antoine BEAU après son décès, sera le secrétaire, et Jean FLOQUET le trésorier. Dans le même temps, on doit quitter la rue Lionnois pour Brabois, installant le musée dans une galerie mise à notre disposition par le Doyen Jacques ROLAND, au niveau de la salle du conseil. Madame Christiane Pelletier, qui gère le secrétariat de Georges GRIGNON, s'investit beaucoup dans cette tâche et la rédaction des « Lettres du Musée », dont la première paraît à l'été 1997, publiant des articles divers sous la plume d'auteurs toujours plus nombreux. Quelques réunions et conférences permettent de nous faire connaître.

Plusieurs salles d'un bâtiment de la faculté sont mises à notre disposition pour y installer documents et matériels peu à peu réunis. Mais c'est surtout au printemps 1999 que se déroule la première grande exposition, intitulée « La Vie Médicale à Nancy, il y a 100 ans », dans la grande salle des fêtes de l'Ecole d'infirmières de la rue Lionnois.

Nous avons été considérablement aidés par les services techniques de l'Hôpital Central, mis à notre disposition par le directeur général adjoint, M. Vuillemin. Ainsi sont réalisées des reconstitutions d'une salle d'opération, d'une chambre de malade, d'une pharmacie, de laboratoires ... De son côté, la section audiovisuelle de la Faculté de médecine réalise de nombreux posters retraçant la vie médicale à Nancy et l'évolution du quartier de l'avenue de Strasbourg. Plusieurs conférences sont organisées. L'ensemble reçoit un énorme succès avec de très nombreux visiteurs.

Georges GRIGNON décède en 2005, après avoir été l'auteur de multiples publications sur l'histoire de notre faculté ou des universités de Lorraine. Jean FLOQUET, devient alors conservateur et prend le secrétariat, tandis qu'une enseignante d'odontologie, Catherine Strazielle, est la trésorière.

De nombreux changements de locaux, avec chaque fois une surface plus restreinte, nous obligent à trier nos documents, et à nous séparer de ceux considérés comme moins importants... Il nous faut même utiliser nos talents de bricolage pour modifier des tables afin d'accueillir les conseils d'administration. Avec ces changements successifs, il nous faut aussi abandonner différents rangements, ce qui s'est fait au profit de quelques associations que nous connaissions et qui en furent très heureuses.

Les Journées de formation continue organisées par la Faculté nous permettent de faire des expositions sur nos activités ou sur l'histoire de la médecine. Sur un stand mis à notre disposition, nous exposons et proposons divers petits ouvrages et fascicules réalisés par l'équipe du musée. La « Lettre du Musée » continue de paraître chaque trimestre, avec des articles rédigés par de nombreux auteurs, membres ou non de notre association. Un recueil des dix premières années de la lettre est édité. En dehors de ses fonctions de conservateur, Jean FLOQUET s'attèle à la réalisation d'un catalogue informatisé des documents et matériels que nous possédons : tâche minutieuse, demandant patience et méthode. Des restaurations de tableaux sont entreprises, mais leur coût oblige à une certaine modération. Une nouvelle vitrine nous permet d'enrichir l'exposition de la salle du conseil de la Faculté de médecine.

Le conseil d'administration évolue et, en 2006, Jean-Luc SCHMUTZ me succède à la présidence, fonction qu'il assumera jusqu'en 2018, date à laquelle arrivent sur le plateau de Brabois les Facultés d'odontologie et de pharmacie. Cet élargissement oblige à repenser l'organisation première, avec un changement d'intitulé, notre association prenant le nom d'« Amis du Musée de la Santé de Lorraine ». Déjà vice-président, Pierre Labrude devient le président. Un nouveau conservateur est nommé par l'Université, Philippe Wernert. Le conseil d'administration s'élargit, accueillant des membres des trois facultés et des professions paramédicales, dont les infirmières.

Avec Jean, nous restons membres du C.A. Nous continuons à écrire des articles pour « La Lettre », en fonction de nos découvertes ou de nos passions. De son côté, Jean poursuit son travail de classification pour laquelle de nouvelles méthodes informatiques doivent être prises en compte, mais cela ne le décourage pas. Il continue cette patiente tâche jusqu'à sa fin... En dehors du musée, nous avons aussi l'occasion de nous rencontrer avec nos épouses, à quelques pièces de théâtre, ou lors d'un sympathique déjeuner au « Capu », offert par le conseil d'administration du musée pour nous remercier de notre longue présence ! Dans un courrier de fin septembre 2024, Jean me faisait part de ses inquiétudes sur sa santé dont la gravité devait l'emporter quelques semaines plus tard. Voilà ces quelques souvenirs d'un long parcours, lors de nos études, puis au sein du musée, et de nos relations amicales. Mais la vie n'est pas toujours « un long fleuve tranquille » ... Adieu Jean. « Tu es passé sur l'autre Rive ».

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ELOGE par le professeur Jean-Luc SCHMUTZ

Propos tenus à l'église lors des obsèques

C'est avec beaucoup de tristesse et d'émotion que je prends la parole en mon nom et au nom de l'Association des Amis du Musée de la Santé de Lorraine suite au décès de notre ami Jean FLOQUET. Je tiens à décrire en fait deux facettes de Jean que j'ai été amené à rencontrer au cours de ma vie.

Une première image est universitaire. Tout d'abord en tant qu'étudiant, j'ai eu la chance de pouvoir bénéficier de son enseignement qui était toujours très clair et très structuré, et que tous les étudiants écoutaient avec beaucoup d'attention. Jean était très pédagogue et aimait enseigner comme il l'a fait à Nancy à la faculté mais également en France et à l'étranger, notamment en Tunisie (Sfax, Monastir). Puis je l'ai revu alors qu'il prenait la responsabilité du service d'anatomopathologie du CHU de Brabois à la suite du Professeur RAUBER, et alors que j'étais interne. Nous étions amenés bien sûr lors de « staffs » à discuter de cas difficiles d'anatomo-pathologie, cette discipline morphologique étant essentielle pour tous les cliniciens. J'ai appris à connaître un éminent neuropathologiste qui était tellement perfectionniste qu'il venait lui-même dans les services pour effectuer les biopsies neuro-musculaires afin d'avoir une technique parfaite et ainsi obtenir une lecture histologique de qualité. J'ai découvert alors un grand spécialiste reconnu en neuropathologie et myopathie. Jean était une référence dans ce domaine après avoir effectué une formation à Anvers et à l'Hôpital de la Salpêtrière à Paris.

J'ai découvert la deuxième facette de Jean quelques années plus tard. Je t'ai quitté anatomopathologiste et je te retrouvais passionné d'histoire de la médecine à la faculté au sein du musée. Celui-ci, comme tout le monde le sait, a été créé en 1974 par le Professeur BEAU. Il en sera le premier conservateur, puis le Professeur GRIGNON prendra la succession en 1996 et organisera le transfert du musée à la faculté de médecine de Brabois depuis la rue Lionnois.

Fin 1996, Georges GRIGNON avec deux amis de longue date, Jacques Vadot et toi Jean, vous créez l'Association des Amis du Musée de la Faculté de médecine de Nancy dont tu seras trésorier avant d'assurer la fonction de conservateur en 2005. Cette association est créée afin être le bras armé pour l'acquisition ou la restauration de nombreuses œuvres d'art exposées au musée avec le soutien financier de nos adhérents, de différentes associations et de dons, et, à ce sujet, nous tenons à tous les remercier ainsi que la famille qui a eu la gentillesse de citer notre association dans le faire-part de décès. Je retrouve alors Jean car Jacques Vadot, dermatologue comme moi, me sollicite pour prendre la présidence de l'association, ce que j'accepte bien volontiers. Je découvre alors un Jean FLOQUET complétement investi dans sa mission de conservateur et avec qui j'allais travailler en parfaite harmonie pendant presque vingt ans. En 2019, tu as souhaité prendre un peu de recul pour laisser la place aux plus jeunes et aussi compte tenu de ton âge et de difficultés auditives qui te gênaient beaucoup lors de nos réunions parfois un peu bruyantes. Tu passes alors le flambeau de conservateur à Philippe Wernert, directeur au CHU de Nancy, passionné d'histoire des hôpitaux et, en ce qui me concerne, je laisse la présidence au Professeur Pierre Labrude lorsque l'association s'est ouverte au pôle Santé et a pris le nom des Amis du Musée de la Santé en Lorraine comme tu le souhaitais et comme tu l'as écrit dans ton dernier article (et tu en as écrit de nombreux) de la Lettre du Musée il y a quelques mois, consacré à l'Hôtel des Missions Royales de Nancy. Tu concluais cet article par un espoir, un rêve peut-être, de voir toutes les collections du musée ainsi que de nombreux matériels exposés dans un bâtiment digne de les accueillir, en l'occurrence l'Hôtel des Missions Royales, œuvre voulue par Stanislas dans le quartier Saint-Pierre.

A travers mes propos, on perçoit toute la personnalité de Jean FLOQUET. Un homme remarquable, discret, disponible, positif et très humain. Passionné de médecine, passionné d'histoire, passionné d'histoire de la médecine, un Grand Homme qui a donné beaucoup de son temps et de son énergie à sa passion, et nous tenons tout particulièrement à l'en remercier. C'est avec beaucoup de peine et de compassion que nous présentons nos plus sincères condoléances à son épouse Andrée, à ses enfants et à toute sa famille.

Cher Jean, nous ne t'oublierons pas, tu resteras à jamais présent dans nos mémoires.

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Fiche du professeur

Formation au Laboratoire d'Anatomie Pathologique de la Faculté de Médecine de Nancy (Pr. Florentin et Rauber).

Stages de Neuro et Myopathologie à l'Institut Bunge d'Anvers - Docteur Van Bogaert (Belgique) et à la Salpétrière à Paris.

ORIENTATION EN PATHOLOGIE SURTOUT NON TUMORALE

- Neuropathologie et myopathologie : développement de cette spécialité jusqu'alors peu pratiquée à Nancy. Pathologie du nerf périphérique (leucodystrophies), pathologie du système neuro-endocrine, maladies dégénératives du système nerveux central, maladies à prions. 

- Pathologie vasculaire : notamment malformative, dans le cadre de la pathologie de la crête neurale (neurocrystopathies).

- Pathologie digestive : tumeurs du Pancréas endocrine, (thèse), apudomes et leurs expressions « neurales » : multiple endrocrine neoplasia.

Adjoint du Pr. Rauber lors de la création du service d'anatomie pathologique du CHU de Brabois.

Enseignement de l'anatomie pathologique aux étudiants en médecine, chirurgiens dentistes (1970-81), au DES (CES). Cours d'anatomie pathologique générale et spéciale en Tunisie. (Sfax, Monastier).

ASSOCIATIONS DIVERSES

Trésorier de l’Association des Amis du Musée de la faculté de médecine de Nancy.

Compléments (B. LEGRAS)

Jean Floquet aimait beaucoup l'histoire. Il a contribué à plusieurs ouvrages et notamment l'un sur le patrimoine artistique et historique hospitalo-universitaire de Nancy. Il a écrit de nombreux articles historiques qui ont été publiés dans La lettre du musée et qui figurent en partie sur ce site. C'était un spécialiste des tableaux de la faculté et avait écrit avec le docteur Vadot et moi-même Les portraits peints, dessinés ou gravés de la Faculté.