SPILLMANN Louis

1875-1940

` sommaire

Autres photos : cliquez ici

Texte extrait de " La dermatologie " par J. BEUREY - Numéro Spécial du Centenaire de la Revue (1874-1974) Annales Médicales de Nancy

En 1908 s'ouvre enfin la période où la dermatologie nancéienne est conduite par des médecins qui lui consacrent exclusivement leur carrière. Le premier en date est Louis Spillmann (fils de Paul Spillmann). Interne des hôpitaux en 1896, chef de clinique en 1900, il est reçu en 1901 au concours d'agrégation (section de Médecine et de Médecine Légale). Son oeuvre est d'abord d'un généraliste, concernant la neurologie, la pathologie infectieuse, la tuberculose. Une de ses publications, sur « l'emploi des rayons X dans une leucémie splénique», en 1904, témoigne d'un esprit d'avant-garde, ouvert aux techniques nouvelles. Sa culture étendue, son aptitude à prendre une vision large et complète des problèmes médicaux vont lui être d'une grande utilité quand lui sera confiée, le 1er novembre 1907, le vieux service de la Maison de Secours. La conception qu'il se fait de sa nouvelle affectation, lui-même la condensera plus tard en une seule phrase, dont certains de ses contemporains auraient bien fait de s'inspirer, car on y trouve déjà définie la règle qui pour la dermatologie moderne reste d'or : « La dermatologie est une branche très spéciale de la médecine, branche dont on ne peut entreprendre l'étude qu'après avoir acquis en médecine générale, tant à l'hôpital qu'au laboratoire, les connaissances indispensables à des recherches cliniques et expérimentales souvent laborieuses, toujours d'un haut intérêt scientifique ». D'emblée, le nouveau titulaire montre de remarquables qualités d'organisateur. Il est vrai que le service, dont les locaux sont d'une affligeante médiocrité, en a le plus grand besoin : presque exclusivement fréquenté par les vénériens et les indigents, il comporte une seule pièce pour les consultations, traitements et examens de laboratoire, le couloir tenant lieu de salle d'attente ; quant aux locaux d'hospitalisation, mal éclairés, mal ventilés, ils sont d'un aspect propre à décourager aussi bien les médecins que les malheureux malades. Aussi accueille-t-on avec soulagement le transfert de cet ensemble vétusté, en avril 1914, dans l'ancien couvent du Sacré-Coeur, devenu l'Hôpital Hippolyte-Maringer. Entre-temps, Louis Spillmann a opté pour une carrière exclusivement dermatologique, et de plus en plus son effort va porter sur la syphiligraphie et la lutte antivénérienne.

Médecin consultant de la VIIIe Armée pendant la guerre de 1914-1918, il multiplie les conférences et les écrits sur le « péril vénérien » à l'intention des militaires. En 1919, il est nommé à la chaire des Maladies Syphilitiques et Cutanées, fondée le 24 mars, et sa leçon inaugurale comporte tout un programme de recherche, d'enseignement et d'éthique médicale. Six ans plus tard, il mène à bien la construction du Dispensaire Alfred-Fournier, auquel est intégré - déjà - un véritable amphithéâtre et dont le nom est également donné au service hospitalier, qui se distingue désormais de l'Hôpital Maringer : là, il met sur pied tout un système médico-social, qui a pour but le traitement et la surveillance des syphilitiques, ainsi que le dépistage des sujets contaminés - autant d'objectifs qui sont alors à l'ordre du jour et dont l'importance ne peut être comprise aujourd'hui que si l'on veut bien se représenter les conditions sociales de cette époque, l'ignorance du public, l'absence de toute organisation de dépistage, l'inquiétante recrudescence des maladies vénériennes à l'issue de la guerre, la fréquente insuffisance des moyens thérapeutiques... Ainsi Louis Spillmann finit-il par disposer de l'instrument qui doit lui permettre d'accomplir la tâche à laquelle il s'est voué, d'autant mieux que le décanat lui est ouvert dès 1926, faisant de l'Hôpital Fournier un centre de stratégie universitaire. Il est même légitime de dire qu'en organisant la défense antivénérienne en Lorraine il est de ceux qui ont tenu en France un rôle capital dans la lutte menée contre cette maladie qui, dans le contexte du temps, méritait son nom de « fléau syphilitique ».