` sommaire

Ophtalmologie

 

par A. RASPILLER

 

les activités hospitalo-universitaires à Nancy (1975-2005)

         

En 1973, à l’ouverture de l’hôpital de Brabois, un deuxième service d’Ophtalmologie est créé. Le Pr. Charles Thomas demeure chef du service de l’Hôpital Central avec le Pr. André Reny comme collaborateur et le Pr. Jacques Cordier devient chef du nouveau service à Brabois. L’enseignement des étudiants du deuxième cycle des études médicales, du certificat d’études spéciales et de l’école d’orthoptie reste unitaire.

 

LE PROFESSEUR CHARLES THOMAS (1906-1987)

 

Dans les années précédant sa retraite en 1976, il équipa son service de l’Hôpital Central d’explorations complémentaires : tonographie en 1966, électrorétinographie et électro-oculographie en 1967, angiographie à la fluorescéine en 1969 et de nouveaux procédés de traitement : cryo-extraction de la cataracte dès 1966 et photocoagulation au xénon de Meyerschwickerath en 1970.

En 1974, il ouvre l’ère des lasers en Ophtalmologie par la mise en route des traitements modernes de photocoagulation avec le laser à argon.

Son œuvre de pionnier de la strabologie est considérable et trouve sa consécration avec la réalisation à Nancy pour la première fois en France en 1974 de l’opération du fil ou Fadenopération. Son ami, le Pr. Curt Cüppers de Giessen, Docteur Honoris Causa de l’Université de Nancy, imagina de suturer le corps d’un muscle oculaire à la sclère, loin derrière son insertion anatomique, pour supprimer l’arc de contact musculo-scléral et induire une diminution progressive de la composante rotatoire lors de la contraction de ce muscle. Cette intervention est toujours largement pratiquée pour corriger les strabismes à angle variable.

 

LE PROFESSEUR JACQUES CORDIER (1912-1990)

 

De 1973 à 1980, date de sa retraite, il développa à l’hôpital de Brabois son domaine de prédilection, le traitement des affections rétiniennes, avec l’aide du Dr. Antoine Raspiller promu Professeur en 1976.

1973 fut le début de la microchirurgie oculaire à Nancy, suite à l’installation au bloc opératoire du microscope Zeiss fixé au plafond et muni d’une lampe à fente motorisée. Cela permettait de repérer en vision binoculaire la ou les déchirures rétiniennes d’un décollement de la rétine avec le verre de contact à 3 miroirs de Goldmann et de les traiter par une cryocoagulation parfaitement dosée sous contrôle visuel. Il s’intéressa aussi au problème de l’indentation sclérale et utilisa dès 1974 les éponges en silicone de Lincoff, les bandes de silastic et réalisa des poches sclérales lamellaires ou rapportées en y enfouissant du fascia lata.

1979 fut le début de la vitrectomie réglée à Nancy avec l’appareil du Pr. Klöti de Zürich. Cette technique a eu un développement considérable et durable, elle autorise le traitement de la prolifération vitréo-rétinienne, des adhérences vitréo-rétiniennes, des hémorragies dans le vitré et les échanges fluides gaz  pour effectuer un tamponnement interne. La première injection d’huile de silicone dans la loge vitréenne eut lieu en 1980 à Nancy.

En 1980, débutèrent l’implantation de quelques cristallins artificiels et l’utilisation des premiers milieux de culture pour la conservation des greffons cornéens.

Le Dr. Etienne Saudax, PH, assura des activités d’Ophtalmologie générale et dirigea la surveillance et le traitement des patients diabétiques du service du Pr. Gérard Debry à l’Hôpital Jeanne d’Arc de Dommartin les Toul.

 

LE PROFESSEUR ANDRE RENY (1933-1982)

 

Professeur en 1970, puis chef du service d’Ophtalmologie de l’Hôpital Central en 1976, il eut une grande activité jusqu’à son décès en juin 1982.

Il explora les possibilités de l’électromyographie des muscles oculaires dans les myopathies dégénératives ou endocriniennes, dans les fractures de l’orbite et dans les syndromes congénitaux d’innervations paradoxales. Il examina plus de 500 cas de fractures de l’orbite et dégagea des règles cliniques sur la nature et l’évolution des déficits oculo-moteurs qu’il publia notamment dans une monographie en collaboration avec le Pr. Michel Stricker.

La recherche de facteurs prédisposant au strabisme essentiel de l’enfant accapara son attention et il étudia tout particulièrement le retentissement de l’action des muscles obliques sur la déviation horizontale.

Il apporta une contribution importante dans la correction chirurgicale du ptosis par suspension au muscle frontal en utilisant un fil synthétique non résorbable, puis du fascia lata autogène. Ses travaux sur les pertes de substance palpébrale ou néoplasique lui ont procuré l’honneur d’être rapporteur à la Société Allemande d’Ophtalmologie de 1979 à Heildelberg de la chirurgie reconstructrice palpébrale.

Ses travaux sur l’appareil lacrymal concernent les facteurs pronostiques de la réussite d’une dacryocystorhinostomie et le traitement des sténoses canaliculaires par intubation bicanaliculaire de silastic ou en dernier recours avec un tube de Jones en pyrex. Il a participé à la rédaction et à la présentation du rapport sur l’appareil lacrymal à la Société Française d’Ophtalmologie en mai 1982 à Paris.

Il initia les consultations spécialisées avec la strabologie, la glaucomatologie, la contactologie, la diabétologie et les différentes explorations fonctionnelles.

 

LE PROFESSEUR ANTOINE RASPILLER (1936-)

 

Le décès prématuré en 1982 du Pr. Reny le laissa seul professeur d’Ophtalmologie à Nancy avec la charge de 2 services. Il quitta la chefferie du service de Brabois en 1985 à la suite de la nomination à la fonction de Pr. du Dr. George. L’aide des responsables de la Faculté et des Hôpitaux lui permit d’organiser l’Ophtalmologie nancéienne vers 2 pôles d’excellence : l’oculoplastique avec le Pr. George et la pathologie vitréo-rétinienne avec la nomination à la fonction de Professeur du Dr. Jean-Paul Berrod en 1996. Le Pr. Raspiller fut admis à la retraite le 1er septembre 2003.

L’activité d’enseignement fut marquée par l’organisation à Nancy en 1983 de la réunion de l’Association Française d’Ophtalmo-Pédiatrie, la création en 1985 de l’Association Lorraine de Perfectionnement Post-Universitaire en Ophtalmologie pour officialiser la formation continue, la préparation de 5 journées de chirurgie en direct, la participation au jury de 84 thèses et la présidence de 82 autres thèses, la rédaction d’une monographie sur l’anatomie de l’angle irido-cornéen et d’une autre sur l’hyperplasie et la persistance du vitré primitif antérieur, et la réalisation d’un film de 22 minutes sur l’opération du fil de Cüppers. Ce film a été projeté de 1979 à 1982 dans divers congrès mondiaux : Berne, Moscou, Paris, Zadar, Monte-Carlo, Bruxelles et San-Francisco.

L’activité clinique vit l’arrivée de la microscopie spéculaire en 1984, de la photosecion au laser yag en 1985, de l’extraction extra-capsulaire de la cataracte avec implantation dans le sac capsulaire, de la chirurgie réfractive par kératotomie radiaire en1986 et de la phaco-émulsification du noyau cristallinien en 1991. Il fut aidé pour le segment antérieur par le Dr. Etienne Hachet, PH, qui quitta l’Hôpital en 1988. Le Dr. Marie-Christine Bazard, PH, prit la responsabilité de l’Ophtalmo-Pédiatrie et des greffes de cornée. Le Pr. Raspiller s’intéressa particulièrement aux glaucomes et développa la chirurgie non perforante dès 1998. Il apporta son aide au Pr. Berrod pour la vitrectomie à 3 voies, les échanges automatisés fluide-gaz et l’utilisation des gaz expansifs et des perfluorocarbones liquides. Les manifestations ophtalmologiques des affections générales furent étudiées notamment la maladie de Horton, la choriocapillaropathie obstructive aigüe au cours de l’état gravido-puerpéral et les effets indésirables des médicaments en Ophtalmologie. Ce dernier thème a conduit à 2 rapports nationaux en 1985 et 1997.

L’activité de recherche porta sur l’étude radio-anatomique, chez le cadavre, de la vascularisation des muscles oculo-moteurs et du segment antérieur de l’œil dès 1979 et sur l’appréciation de l’épaisseur de la couche des fibres optiques rétiniennes par analyse polarimétrique avec la collaboration du laboratoire de cristallographie et modélisation des matériaux minéraux et biologiques de la Faculté des Sciences de Nancy. Un prototype est en cours d’évaluation.

 

LE PROFESSEUR JEAN-LUC GEORGE (1954-)

 

Il continue et développe l’œuvre du Pr. Reny en se consacrant maintenant quasi-exclusivement aux affections extra-oculaires recouvrant les pathologies orbito-oculo-palpébrales, l’appareil lacrymal avec la surface du globe et l’oculo-motricité. Ses travaux concernent :

- les nouveaux principes de réfection des cavités d’énucléation en corrigeant les anomalies palpébrales et l’énophtalmie.

- la prise en charge et la réhabilitation des exophtamies thyroïdiennes.

- le traitement chirurgical des cancers palpébraux avec greffes cutanéo-muqueuses.

- les strabismes et surtout les déficits oculo-moteurs complexes en relation avec la pathologie orbitaire en introduisant la notion de chirurgie du regard. Plus de 600 interventions sont réalisées chaque année dont un tiers chez l’adulte.

- l’utilisation de la microchirurgie pour la réparation des canalicules lacrymaux.

- la chirurgie endonasale pour la réalisation d’une dacryorhinostomie en participant à la mise au point du matériel endoscopique et d’une fraise protégée.

- la fenestration de gaines du nerf du nerf optique pour le traitement des oedèmes papillaires idiopathiques avec retentissement visuel.

Le Pr. George dirige l’école d’orthoptie depuis 1996 et il a anticipé l’évolution de la profession d’orthoptiste en adjoignant à l’oculo-motricité les domaines de la réfraction et des explorations fonctionnelles. Avec quelques collègues, il a fondé un diplôme inter-universitaire de pathologie orbito-palpébrale.

Il est aidé par les Dr. Pierre Lesure, Karine Angioï-Duprez et Toufic Maalouf. Le Dr. Lesure, PH, est responsable des affections du segment antérieur de l’œil, du traitement optique des myopies fortes par implantation de cristallin artificiel et des greffes de cornées. Le Dr. Maalouf a été nommé PH à temps plein en 2003. Le Dr. Angioï-Duprez a été promue Professeur des Universités-Praticien Hospitalier en 2003, elle est responsable du domaine œil et maladies générales et d’un important secteur de rétine médicale avec le dépistage et le traitement de la rétinopathie diabétique des patients du service de Médecine G du Pr. Olivier Ziegler, des dégénérescences maculaires liées à l’âge, de la rééducation basse vision, de l’angiographie fluorescéinique et au vert d’indocyanine et des explorations fonctionnelles.

 

LE PROFESSEUR JEAN-PAUL BERROD (1956- )

 

Collaborateur du Pr. Antoine Raspiller depuis 1988, il est promu PU-PH en 1996, puis Chef du service d’Ophtalmologie de l’Hôpital Central en 2002.

Son activité hospitalière s’oriente vers la prise en charge des affections du vitré et de la rétine et plus particulièrement la pathologie maculaire ainsi que les décollements de la rétine. Le service de Nancy fait figure de référence en raison de son équipement unique en 1988 : laser endoculaire et système complet d’échange fluide-air avec contrôle per-opératoire à vision panoramique. La chirurgie maculaire des membranes puis des trous est réalisée dès 1993. Le service est équipé en 1999 d’un laser pour la photothérapie dynamique qui permet une occlusion sans effet thermique des néovaisseaux sous rétiniens de la dégénérescence maculaire liée à l’âge. La réduction de la durée d’hospitalisation en maintenant la qualité des soins est un souci constant afin de faire face à une augmentation du nombre de patients alors que les lits d’hospitalisation subissent une réduction de 30 à 14 dans le courant de l’année 2000 pour des raisons de mise en conformité à la nouvelle norme de sécurité incendie. Le service est alors doté de 3 places ambulatoires pour conserver une activité proche de 1000 interventions par an sur le vitré ou la rétine et de 600 opérations de la cataracte. Le service est équipé en 2001 du premier tomographe à cohérence optique pour la province. Il s’agit d’un système d’imagerie non contact et non invasif permettant l’étude des microstructures tissulaires avec étude tomographique des structures rétiniennes de la macula in vivo. Son apport est considérable dans le diagnostic et les indications thérapeutiques des affections maculaires.

L’activité d’enseignement est marquée par l’installation d’équipements vidéo pour la retransmission des examens ou des interventions ainsi que la réalisation de montages vidéo didactiques. Le service reçoit chaque année de nombreux visiteurs venant se former aux techniques de chirurgie vitréo-rétinienne. Un diplôme inter-universitaire a été créé en 2002 en collaboration avec les Facultés de Dijon et de Bordeaux auquel s’inscrivent des ophtalmologistes nationaux et européens.

 

CONCLUSION

 

L’Ophtamologie nancéenne participe à l’essor considérable de la discipline avec les pôles d’excellence des affections extra-oculaires et de la pathologie vitréo-rétinienne.

Le rapprochement des 2 services est évoqué depuis l’année 2000, il est acquis mais sa localisation n’est pas encore arrêtée.