Chirurgie
orthopédique et traumatologique
par J-P. DELAGOUTTE
La
Chirurgie Orthopédique et Traumatologique au
Centre Hospitalier de Nancy,
comme dans la plupart des
Hôpitaux Français, fut l’objet, durant ces trois ou quatre dernières décennies, de modifications profondes. Elles
portèrent, non seulement sur l’autonomisation de la spécialité mais aussi sur
l’apparition de nouvelles techniques touchant à la fois la traumatologie, dont
le matériel d’ostéosynthèse devint d’une grande rigueur, et les arthroplasties
qui permirent des prouesses fonctionnelles
inimaginables quelques dizaines d’années auparavant. De même,
l’arthroscopie a bouleversé le paysage de notre spécialité en permettant
d’effectuer des gestes d’orthopédie et de traumatologie (en effet même le
traitement arthroscopique des fractures est possible
dans certains cas) moins invasifs et plus anatomiques et entraînant une rançon cicatricielle moindre et pourvus d’une
faible morbidité.
STRUCTURATION DE LA
TRAUMATOLOGIE-ORTHOPEDIE
Au
centre Hospitalier de Nancy, comme partout ailleurs en France, la Chirurgie
orthopédique et Traumatologique resta très longtemps dans l’ombre de la
Chirurgie Générale. Il a fallu toute l’autorité de certains Maîtres pour que notre spécialité soit reconnue et isolée et
que des services spécialisés soient créés. A ce propos, nous devons
citer le nom de Robert Merle d’Aubigné
qui, parmi les premiers, créa une telle
structure à l’Hôpital Cochin à Paris.
Vers
les années 60, deux services de Chirurgie générale existaient à Nancy, situés de part et d’autre de la cour centrale :
l’un, la Chirurgie A, était dirigée par
le Pr. Chalnot et comprenait les salles 1 à
7 ; l’autre, la Chirurgie B, dont la responsabilité incombait au Pr. Bodart occupait les
salles 2 à 8. Ces deux unités se
partageaient la traumatologie qu’elles recevaient un jour sur deux et
l’orthopédie. Ces salles comprenaient une vingtaine de lits alignés le
long des murs et une paillasse centrale,
où gravitait le personnel soignant, dirigé la plupart du temps par une
Religieuse de la Congrégation de Saint Charles tout de noir vêtue et
coiffée d’une cornette encombrante autant que majestueuse. C’est ainsi
qu’en passant la visite, nous pouvions apporter nos soins aussi bien à un patient porteur d’une fracture de Pouteau, qu’à un
traumatisé crânien ou à un malade opéré d’un cancer ou d’un ulcère de
l’estomac. Dans ces deux services, un ou
plusieurs praticiens, tout en restant généralistes, s’intéressaient plus
particulièrement à la pathologie ostéo-articulaire en
restant sous la responsabilité des chefs de services respectifs.
En
Chirurgie B, sous la houlette du Pr. Bodart, déjà sensibilisé à l’Orthopédie infantile, le Pr. Sommelet développa l’Orthopédie et la Traumatologie adulte.
Il poursuivit cette activité pendant plusieurs
années jusque vers les années 67- 68, date à laquelle fut créée la
Clinique de Traumatologie et d’Orthopédie
dont il devint le Directeur,
quittant ainsi le giron du CHU,
cet établissement dépendant de la Caisse d’Assurances Maladies. Les
contacts se poursuivirent néanmoins
entre cet établissement et le CHU par l’intermédiaire de réunions
thématiques au cours desquelles s’échangeaient des idées fructueuses et
constructives, chaque service, ayant choisi une orientation thérapeutique
propre, présentant les résultats de ses
recherches et des interventions qu’il pratiquait. Le Pr. Sommelet
dirigeait cette maison avec autorité et rigueur ; il fut secondé par le
Pr. Daniel Schmitt en 1971 et c’est tout naturellement que ce dernier lui
succéda au moment de son départ à la
retraite en 1989. Il continua le travail initié par son Maître s’orientant surtout vers la Chirurgie de la
hanche dont il mit au point une prothèse non cimentée. Lorsqu’il fit valoir ses
droits à la retraite, c’est le Pr.
Daniel Molé qui prit en mains les destinées de la clinique, dont il est
actuellement le Directeur Médical ; il y
développe la chirurgie de l’épaule
qu’il pratique à un niveau d’excellence et où il a acquis une notoriété nationale et internationale.
De même, les contacts entre les services de la spécialité du CHU se
poursuivent activement non seulement sur
le plan de la prise en charge des urgences mais également au plan scientifique,
surtout depuis la création d’un Syndicat Inter Hospitalier dans notre
spécialité, comme nous le verrons ci dessous.
En
Chirurgie A, le Pr. Michon fut le pionnier de la
spécialisation de l’Orthopédie Traumatologie. D’une grande ouverture d’esprit et ayant compris
l’intérêt de fréquenter les services d’avant garde, il lia de solides amitiés
avec ses collègues parisiens en particulier avec les praticiens du service
du Pr. Merle d’Aubigné. Il put ainsi
glaner des techniques nouvelles qu’il appliqua à ses patients et qu’il apprit à
ses élèves ; citons entre autres, les ostéotomies intertrochantériennes
initiées par Pauwells dans le traitement de la
coxarthrose et des dysplasies de hanche chez l’adulte, et l’intervention de Bankart dans la cure de la
luxation récidivante de l’épaule. Il se rapprocha aussi des Pr. Tubiana
et Vilain et ils formèrent, avec le Pr. Allieu de Montpellier le premier noyau du Groupe d’Etudes
de la Main qui deviendra plus tard la Société Française de Chirurgie de la
Main. Il conforta son orientation vers la Chirurgie de la Main en même
temps qu’il s’initia à la micro-chirurgie et plus spécialement à la suture
nerveuse sous microscope qu’il développa et
dont il devint une référence
nationale et rapidement internationale. Son autonomie était donc
irréversible et c’est tout naturellement que, lorsque l’Hôpital Jeanne d’Arc
fit partie de notre CHU, un service lui
fut confié ; il put ainsi développer cette chirurgie en pleine expansion.
Il comprit également tout l’intérêt d’un rapprochement de la Chirurgie ostéo-articulaire avec la Réadaptation fonctionnelle et
professionnelle ; il put ainsi bénéficier
d’installations particulièrement adaptées au genre de chirurgie qu’il
pratiquait avec l’aide de la Caisse
Régionale d’Assurance Maladie qui a mis
à sa disposition un personnel compétent et du matériel adéquat, à
l’Hôpital Jeanne d’Arc. Le Pr. Michon ne perdait
néanmoins pas de vue l’Orthopédie « lourde » ; dans cette
optique, il fit appel en 1970 au Dr. Delagoutte,
alors Assistant Chef de Clinique au Service de Chirurgie B dirigé par le Pr.
Bertrand qui venait de succéder au Pr. Bodart, pour
venir l’aider dans le démarrage de son Service et auquel il confia cette part de la Chirurgie osseuse. Cette
collaboration dura presque 10 ans. Néanmoins, la spécialisation de la
chirurgie de la Main et de la
micro chirurgie devenait de plus en plus nécessaire et il fallut trouver une solution pour
autonomiser complètement cette chirurgie en pleine expansion et trouver un
service pour accueillir le Pr. Delagoutte et la
Chirurgie orthopédique « lourde ». L’occasion se présenta en 1979 au moment de la scission du Service
de Chirurgie cardiaque à l’Hôpital Brabois et de la diminution de l’activité du service
dirigé par le Pr. Bénichoux, issu de cette
scission ; il fut alors demandé au
Pr. Delagoutte de pratiquer et de développer sa spécialité dans ces locaux. Une salle
d’opération fut aménagée, dédiée à cette chirurgie puis plus tard un nouveau Service situé au rez-de-chaussée
de l’Hôpital. L’activité de ce nouveau Service était essentiellement
orthopédique ; il ne participait pas à la prise en charge des
urgences ; il recevait néanmoins quelques traumatisés bien ciblés et
recommandés. Une collaboration fructueuse et efficace se développa avec le
Service de Rhumatologie dirigé par le Pr. Gaucher secondé par le Pr. Pourel ; cette collaboration était facilitée par
l’unité de lieu et fut particulièrement
intense. Au départ du Pr. Bénichoux, le service
devint le Service de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique du CHU.
Au
départ du Pr. Michon pour l’Hôpital Jeanne d’Arc, la
traumatologie, au service de Chirurgie
A, fut confiée au Pr. Vichard ;
il assura cette tâche jusqu’à son installation au CHU de Besançon où il devint responsable du
Service de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique.
Un
nouveau changement dans notre CHU
intervint au moment du départ
du Pr. Frisch, responsable du service de
Chirurgie B ; à cette occasion, se
posa la question de la création à
l’Hôpital Central qui recevait l’immense majorité des traumatisés et des
urgences, d’un service spécialisé dans cette pathologie en transformant ce
service de Chirurgie Générale en un service de Chirurgie Traumatologique et
Orthopédique. Il fut créé et sa direction fut confiée au Pr. Delagoutte qui, en libérant le service qu’il occupait à
l’Hôpital Brabois,
permettait à la chirurgie vasculaire de s’autonomiser, alors qu’elle se
pratiquait jusque là dans le service de
Chirurgie B avec les Pr. Frisch et Fiévé. Ce dernier
en devint le responsable.
Les
derniers changements dans l’organisation de la Chirurgie Orthopédique et
Traumatologique consistèrent en la création, par scission du service de
chirurgie Orthopédique et Traumatologique, nouvellement créé, d’un nouveau service de la spécialité confié
au Pr. Coudane, ce dernier étant également Professeur
de Médecine Légale à notre Faculté.
Il
faut également citer le départ prématuré du Pr. Merle qui céda son service au Pr. Dautel ;
la dynamique lancée par le premier est poursuivie par le second, le service de l’Hôpital Jeanne d’Arc
continuant d’être une référence en matière de chirurgie de la main et du
traitement des pertes de substances des membres, grâce à une connaissance très
fine de la chirurgie des lambeaux, qu’ils soient régionaux ou libres. Le Pr. Dap est un collaborateur efficace auprès du Pr. Dautel ; ils sont ensemble à la tête d’une équipe active, fonctionnelle et
performante.
Enfin
notre spécialité recentra ses moyens au
sein d’un Syndicat Inter
Hospitalier par la naissance, en 2001, du SINCAL
qui regroupe les deux services de l’Hôpital Central où opèrent les Pr. Coudane, Mainard et Delagoutte,
ce dernier étant sur le point, dans à peine 18 mois de prendre sa retraite, le
service de Chirurgie de la Main du Pr. Dautel associé
au Pr. Dap et la Clinique de Traumatologie et
d’Orthopédie, rue Hermite, dirigée par le Pr. Molé secondé par les Dr. Roche et
Sirveaux, praticiens hospitaliers. Ce Syndicat
est l’objet de vicissitudes qui
le feront éclater, puisque, en janvier
2006, les deux départements situés à l’Hôpital Central quitteront cette
structure et rejoindront le giron du CHU.
Il a préfiguré et préfigure actuellement sans aucun doute la naissance
dans quelques années d’un vaste ensemble dédié à notre spécialité et regroupant
sur le site de l’Hôpital Central l’ensemble des acteurs de la Pathologie de
l’Appareil Locomoteur. Cet ensemble permettra une collaboration efficace avec
nos collègues de Médecine physique ; ces derniers vont bénéficier en effet
dans quelques mois sur le site Meurthe-Canal d’une importante structure qui
recentrera toutes les facettes de la réadaptation fonctionnelle et
professionnelle, actuellement dispersées sur plusieurs sites (Nancy, Gondreville, Bainville
sur Madon, Dommartin
les Toul…)
LES
AVANCEES TECHNOLOGIQUES
Les
trente dernières années furent très
riches en progrès technologiques, tant dans le domaine
de la Traumatologie que dans le domaine de l’Orthopédie. Ils permirent une chirurgie fonctionnelle autorisant non
seulement une prise en charge précoce de la rééducation mais aussi une
réinsertion sociale et professionnelle plus rapide et de meilleure qualité.
Ces
progrès sont fondés sur la pluridisciplinarité ; les chirurgiens ont
compris qu’ils ne pouvaient pas maîtriser les problèmes mécaniques,
métallurgiques ou chimiques que nécessitait la mise au point de nouvelles
techniques d’ostéosynthèse ou d’arthroplastie. A ce propos, John Charnley fut
sûrement un précurseur, s’étant
très tôt entouré d’ingénieurs fondamentalistes dans le domaine des plastiques,
de la métallurgie et de la biomécanique.
Cette coopération lui permit de mettre au point la première prothèse
totale de hanche vraiment fonctionnelle fondée sur la Low
Friction et de l’appliquer aux
patients sur une grande échelle. Il avait choisi le couple articulaire métal
plastique : il utilisa d’abord le téflon ; ce fut un échec et
rapidement il remplaça ce plastique par
le polyéthylène de haute densité qui se révéla être le bon choix. Il
introduisit également le ciment chirurgical pour stabiliser les implants dans
l’os. Parallèlement à ces recherches, l’équipe de Mac Kee
et Farrar
développa le concept Métal-Métal
qui se heurta à des problèmes de grippage qui fit abandonner, au moins
temporairement, ce couple articulaire car son principe est à nouveau repris
dans l’élaboration d’implants récents. D’autres équipes, en particulier
françaises, participèrent au développement de ces arthroplasties : nous
devons citer les Pr. Merle d’Aubigné et
Judet ; le premier tenta d’améliorer la prothèse de Mac Kee Farrar ; le
deuxième, ayant mis au point quelques
années auparavant une prothèse céphalique pure en Bakelite-Plexiglass,
introduisit l’idée d’une prothèse réhabitable qui connut depuis un développement
considérable ; les chirurgiens suisses et italiens initièrent également des travaux dans ce
domaine.
A
Nancy, ces arthroplasties totales remplacèrent rapidement dès les années
1968-69 les arthroplasties céphaliques dont les résultats au-delà de la 7ème ou
8ème année s’avérèrent catastrophiques en matière d’usure cartilagineuse et de
descellement.
Les
années suivantes virent se développer de façon fulgurante ces techniques de
remplacement prothétique ; elles se situaient non seulement au niveau de
la hanche, mais très rapidement au niveau du genou et plus tardivement au
niveau de l’épaule. Ces techniques poursuivent leur progression et chaque année
apparaissent des améliorations qui rendent ces interventions de plus en plus
fiables et durables : polyéthylène
plus performant, apparition de l’hydroxyapatite, de
l’alumine et autres biomatériaux. Ces arthroplasties remplacent non seulement
les articulations détruites par l’arthrose ou les maladies inflammatoires mais
également des pertes substance osseuse d’origine traumatique ou tumorale ;
dans cette dernière étiologie, ces résections osseuses sont permises par les
progrès de la chimiothérapie qui devient de plus en plus efficace.
Les
biomatériaux furent également un sujet
d’étude dans notre spécialité. Le Pr. Bénichoux,
qui dirigeait depuis 1973 l’Institut de Recherches Chirurgicales, profita de la
présence du Pr. Delagoutte à ces côtés pour
développer ce créneau en orientant la recherche vers les biomatériaux de
remplacement du cartilage articulaire. Il créa, avec la collaboration du Pr.
Merle, l’Institut Européen de Biomatériaux et de Micro-chirurgie qui poursuivit ses travaux dans ce domaine et
dont les responsables furent successivement les Pr. Merle, Mainard et Delagoutte.
En
ce qui concerne la traumatologie, le matériel d’ostéosynthèse fut l’objet de
progrès considérables, tant sur le plan des matériaux utilisés qu’en ce qui
concerne leur conception, chaque segment de membre pouvant recevoir un matériel
adapté et spécifique ; la notion de compression interfragmentaire
déjà initiée par Danis, fut mise en application, en
particulier par l’équipe de Muller en Suisse qui mit au point une
instrumentation adaptée et exigeante sur le plan de la technique opératoire qui
devint très rigoureuse. Le concept de l’enclouage à foyer fermé dû à Kuntscher fut développé
en rendant la technique plus fine et précise et en y adjoignant la
notion de verrouillage qui en augmenta les indications en particulier dans le
traitement des fractures instables et poly-fragmentaires. Enfin la technique d’Ilizarov fondée sur la notion d’ostéogenèse en distraction
fut une véritable révolution dans la compréhension de la consolidation osseuse
et permit de traiter des pertes de substance osseuses et de compenser certaines
inégalités de longueur des membres.
La
chirurgie de la main initiée par le Pr. Michon connut
un important développement en particulier grâce à l’application à cette
chirurgie des techniques microchirurgicales ; la traumatologie de la main
connut une expansion très importante sous l’impulsion en particulier du Pr.
Merle qui créa à l’Hôpital Jeanne d’Arc du CHU, un service SOS Main qui devint
très rapidement un centre de recrutement
régional très actif. La micro chirurgie permit également le traitement
des pertes de substance grâce à
l’utilisation de lambeaux dont les sites
se multiplièrent et dans la mise au
point desquels l’équipe des Pr. Michon et
Merle fut très active. De même
furent développées, par cette même équipe, les techniques
d’ostéosynthèse adaptées à la chirurgie de la main fondées sur la miniaturisation du matériel
ancillaire et des implants. Un manuel fut
édité par cette équipe qui fait encore autorité actuellement.
Dans
une vision à long terme dont il avait le secret, le Pr. Michon suggéra à son élève, le Pr. Delagoutte de défricher, vers les années 70-75 la
pathologie du Pied, reléguée à cette époque au rang de chirurgie mineure. C’est
ainsi que la podologie chirurgicale connut un essor important et que le CHU de
Nancy devint un centre de référence en ce domaine. En 1989, le Pr. Delagoutte
publia un ouvrage de référence sur l’aspect chirurgical de cette pathologie qui
resta longtemps l’ouvrage de base dans notre spécialité. Il présida aux
destinées de la Société Française de Médecine et Chirurgie du Pied pendant
quatre ans, vers les années 80.
L’arthroscopie,
décrite dés 1970 sous l’impulsion des auteurs japonais (Watanabé
en particulier) et dont rêvait le Pr. Louyot
responsable à Nancy d’un des premiers services Français de Rhumatologie (il
avait d’ailleurs imaginé un mandrin muni d’un système optique pour cette
utilisation), fit son apparition à Nancy vers les années 80, et bouleversa
progressivement les habitudes chirurgicales et les programmes opératoires. Elle
resta d’obédience chirurgicale, les médecins craignant le risque infectieux si elle n’était pas pratiquée en milieu
rigoureusement aseptique. Initialement
réservée à la pathologie du genou où elle permettait de traiter les
lésions méniscales, elle concerna
rapidement l’épaule et à un degré
moindre la cheville et le poignet. Méthode diagnostique, elle passa rapidement
au stade de méthode thérapeutique : ligamentoplasties
du genou, stabilisation des luxations récidivantes de l’épaule, acromioplastie et réparation des ruptures des tendons de la coiffe des rotateurs de l’épaule,
arthrodèse de cheville… Elle permit des réduire sensiblement l’incidence des
complications de la chirurgie, notamment infectieuses. Elle est un complément
aux techniques d’imagerie moderne
(tomodensitométrie et IRM) qui
ont, elles aussi progressé de façon considérable dans notre spécialité. Elle autorisa
également un gain d’économie des dépenses de santé par la réduction des durées de séjour
hospitalier. Elle s’intègre au concept
de chirurgie mini-invasive qui continue à progresser,
et à celui de la chirurgie ambulatoire
qui ne cesse de gagner du terrain. En 20
ans, la durée moyenne de séjour des patients d’orthopédie-traumatologie
est passée de 15 à 5 jours ; ce
fait autorise les regroupements de structures et modifie le concept des
Services de Chirurgie ostéo-articulaire où les
plateaux techniques se trouvent privilégiés par rapport aux secteurs
d’hospitalisation.
EXPANSION
DE LA SPECIALITE
Dans
notre pays, comme dans les autres pays développés du monde, la Chirurgie
Orthopédique et Traumatologique est
aujourd’hui la spécialité chirurgicale la plus pratiquée ; ce
développement représente un progrès fulgurant, puisque cette spécialité, comme
nous l’avons vu, n’est née que depuis à
peine trente ans. En France, se
posent chaque année plus de 100000 prothèses de hanche et presque
autant de prothèses de genou ; il
se pratique plus de 600000 arthroscopies annuellement ; l’arthroscopie représente à elle seule un tiers de l’activité.
De
nombreuses Sociétés savantes se sont structurées : nationales (SOFCOT :
Société Française de Chirurgie
Orthopédique et Traumatologique), européennes
(EFFORT : Société Européenne de Chirurgie Orthopédique et
Traumatologique ; ESKA :
Société Européenne de Chirurgie du Genou et d’Arthroscopie,
SECEC : Société Européenne de
Chirurgie de l’Epaule et du Coude…) ou internationales (SICOT :
Société Internationale de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique,
AOLF : Association des Orthopédistes de Langue Française). Localement, il
existe une Société provinciale active (la SOTEST : Société de Chirurgie
Orthopédique et Traumatologique de l’Est) qui regroupe les Chirurgiens
Orthopédistes de la Lorraine, de l’Alsace, de la Franche Comté et des
Ardennes ; elle est une des plus
dynamiques de France ; ses réunions sont toujours très fréquentées
et ses travaux remarqués et publiés dans
une revue européenne « l’European Journal
of Orthopaedy and Traumatology ». Toutes ces Sociétés initient des
travaux de recherche et permettent une évolution permanente de la technologie
et des techniques.
Dans
la région lorraine, de nombreux spécialistes se sont installés en milieu
libéral ou hospitalier, provenant pour la plupart des trois Ecoles du CHU de
Nancy. En 1975, la chirurgie osseuse, comme nous l’avons vu, faisait partie de
la Chirurgie Générale, et on ne
comptait, dans les quatre départements lorrains, que huit chirurgiens
spécialisés en Orthopédie-Traumatologie ; trente ans plus tard, en 2005,
on en dénombre 56.
CONCLUSION
La
chirurgie de l’appareil locomoteur a maintenant acquis son autonomie ;
elle est une spécialité à part entière et représente un pan important dans
l’activité de notre CHU. Elle est en plein essor et cet essor ne peut que se
développer encore, en raison de l’augmentation d’une part de la durée de vie de la population exposée
aux traumatismes et au vieillissement articulaire et d’autre part des lésions provoquées par les loisirs.
Cette
chirurgie est encore dispersée actuellement ; elle atteindra son plein épanouissement et tout son dynamisme lorsqu’elle sera regroupée
au sein d’une structure unique que tous ses acteurs réclament de leurs vœux.