Extrait du texte du Pr. GRILLIAT
Construction de l’Hôpital Central
Ce fut
Prosper Morey, élève de Viollet-le-Duc, qui fut chargé
d'élaborer le projet architectural. Il retint une vaste cour d'honneur avec les
bâtiments administratifs, les bâtiments pour les sœurs de Saint-Charles. Face à
l'entrée, la chapelle avec un passage de part et d'autre permettant d'accéder
aux bâtiments d'hospitalisation. Les deux bâtiments principaux furent désignés
par les noms de leurs donateurs, l'un Collinet-de-la-Salle
et l'autre Roger-de-Videlange.
Les bâtiments d'hospitalisation et d'enseignement ont une longueur de cent trente mètres. Ils se composent de salles de malades interrompues au centre par un massif qui contient tous les locaux destinés à l'enseignement. Chacune des moitiés latérales est à son tour partagée en deux par un massif contenant des escaliers, des cabinets de bains, des water-closets, des chambres d'isolement et des décharges. Chaque bâtiment présente donc dans sa longueur, quatre salles de malades et trois massifs intermédiaires. Au niveau des salles, la largeur est de neuf mètres ; elle est de seize au niveau des massifs, chacun de ces derniers faisant une saillie de sept mètres sur les façades extérieures par rapport à l'axe général de l'établissement. Les façades intérieures par rapport à cet axe sont continues et uniformément éloignées l'une de l'autre de quarante mètres. L'espace est rempli par un jardin. Les salles de malades placées au rez-de-chaussée ou au premier étage sont toutes semblables : quatre par étage, huit par bâtiment, seize en tout.
La première tranche de construction fut réalisée entre l'automne
1879 et l'été 1883. A cette date, la capacité disponible était de trois cents
lits. Dix ans plus tard, le rapport administratif dit que le nombre de lits
disponibles est passé à quatre cents, en relation probable avec la construction
du pavillon d'Ophtalmologie. On assiste également au développement de consultations
gratuites spécialisées : Electrothérapie (1897) ; Orthopédie (1897) ; ORL
(1897) ; Urologie (1901). En 1907, furent crées vingt lits d'ORL et douze lits
d'Urologie. En 1909, l'établissement situé en face de l'Hôpital civil, dit
Maison Marin, servait de complément et accueillait les patients convalescents.
En 1908, la capacité d'hébergement était de cinq cent trente-deux lits avec une
occupation moyenne de quatre cent soixante-seize malades, mais cinq ans plus
tard, en 1913, l'occupation moyenne était de cinq cent soixante-sept, ce qui
veut dire qu'il existait un encombrement permanent et que les salles, prévues
pour quinze malades, en accueillaient jusqu'à trente.
Plan de Morey (1878) L'hôpital civil en 1883
Le fonctionnement du nouvel hôpital
Le fonctionnement du service médical était réglé par un certain nombre de dispositions consignées par un règlement intérieur des Hospices civils de Nancy (1889) :
• Le corps médical est tenu de se conformer aux règlements et décisions de l'administration en ce qui concerne les services intérieurs de l'hôpital. Les médecins sont responsables de leurs services tant en ce qui concerne les traitements de leurs malades qu'en ce qui touche le régime alimentaire, l'hygiène, le service des infirmiers.
• Les médecins doivent procéder à la visite de leurs malades tous les jours de 7 heures à 10 heures du matin. La contre-visite n'est obligatoire que pour l'interne du service qui, en cas d'urgence, fait venir le chef du service intéressé.
• Au cours de la visite de leurs malades, médecins et chirurgiens sont accompagnes des sœurs responsables des salles, des étudiants et des élevés internes ou externes. Les prescriptions médicales et les régimes alimentaires de chaque malade doivent être inscrits sur des cahiers prévus à cet effet, qui doivent être signés et contrôlés chaque jour par les médecins et chirurgiens responsables, puis disposés à la pharmacie et à l'économat.
• Le
règlement intérieur fait obligation aux chefs de services de tenir un registre
des statistiques. A la fin de chaque mois, il doit remettre à la Commission
administrative le rapport rendant compte de l'état précis des malades ou
blessés séjournant depuis plus de trois mois à l’hôpital.
• Chaque
année, ils doivent adresser à la Commission un rapport sur les cas graves ou extraordinaires,
sur les malades endémiques ou épidémiques, constatés pendant leur service.
II faut
insister sur le fait que l'arrivée de la Faculté de médecine de Strasbourg à
Nancy eut pour effet de donner un caractère universitaire au système hospitalier.
En fait, les services médicaux de l'Hôpital civil étaient tous affectés aux
cliniques de la Faculté de médecine. Par conséquent, les médecins chefs de
services étaient des professeurs de la Faculté nommés par la Faculté. Ainsi, se
développa un certain pouvoir médical dépendant de la Faculté qui devait tenir
compte des structures administratives hospitalières. D'ailleurs, dès 1896,
l'Institut anatomique de la Faculté de médecine s'implanta à proximité de
l'Hôpital civil, rue Lionnois. Et, en 1902, l'ensemble
des services de la Faculté de médecine était installé de part et d'autre de la
rue Lionnois, en bordure de l'hôpital. Ainsi, se
trouvait réalisé, au moins au plan architectural, un ensemble qui préfigurait,
des le début du siècle, le centre hospitalo-universitaire réalisé cinquante ans
plus tard.
Les
différents services médicaux
Lors de
l'ouverture, l'Hôpital civil comptait cinq services de cliniques installés dans
les deux grands pavillons d'hospitalisation prévus : Clinique Chirurgicale « A
» dirigée par le docteur Théodore Weiss au rez-de-chaussée du pavillon Collinet-de-la-Salle ; Clinique Médicale « A » du
professeur Hippolyte Bernheim au premier étage du même pavillon ; Clinique
Chirurgicale « B » dirigée par le professeur Frédéric Gross qui occupait le
rez-de-chaussée du pavillon Roger-de-Videlange ;
Clinique Médicale « B » du docteur Victor Parisot au
premier étage du même pavillon. On remarquera que cette distribution resta
inchangée jusqu'à l'ouverture de l'hôpital de Brabois en 1973. Une cinquième
clinique (Ophtalmologie) eut du mal à trouver sa place et fut, dans un premier
temps, installée dans les locaux mansardés du pavillon Collinet-de-la-Salle
en attendant qu'une construction prévue dans la cour d'honneur permette une
installation plus décente.
La pension Bon-Secours
Dès l'établissement du rapport Tourdes en 1877, il fut prévu de construire une vingtaine de chambres individuelles pour malades payant un prix de journée spécifique déterminé pour les hospitalises et leurs accompagnants éventuels, y compris dans certains cas domestiques particuliers. Ces patients étaient soignés par le médecin de leur choix, hospitalier ou non. Les produits pharmaceutiques étaient réglés en plus du prix de journée. Pour attirer vers l'hôpital la clientèle aisée, l'administration n'hésita pas à faire des aménagements et des agrandissements, en particulier en 1904 elle implanta un ascenseur hydraulique et même installa le téléphone. Le nombre de lits passa de vingt-deux en 1903 à soixante-deux la veille de la Première Guerre mondiale, répartie en quatre classes d'hospitalisation (neuf hors classe, dix-huit en première classe, neuf en deuxième et dix-neuf en troisième). Située dans la cour d'honneur de l'hôpital Central, elle fut notablement agrandie après 1919 (création du nouveau Bon-Secours) et fonctionna selon le même principe jusqu'à l'ouverture de l'hôpital de Brabois.
Avant la Première Guerre mondiale
Le
développement de l'activité hospitalière au début de ce siècle se traduisit par
de nombreux travaux qui étaient à peu près terminés au moment de la guerre.
Ainsi, l'hôpital Maringer - anciennement Maison du Sacré-Cœur - assurant l'enseignement des jeunes filles
bourgeoises de la région, mais confisqué au titre des lois laïques de 1904,
venait d'être réaménagé pour recevoir le Service de Dermatologie-Vénérologie
situé précédemment à la Maison de secours. L'hôpital Villemin, destiné à
recevoir les tuberculeux et construit dans la propriété des Dames du Sacré-Cœur, devait être inauguré en novembre 1914.
D'autres projets furent stoppés et ne purent être repris qu'à la fin des
hostilités.