1887-1955
Autres photos : cliquez ici
Texte extrait de " La dermatologie " par J. BEUREY - Numéro Spécial du Centenaire de la Revue (1874-1974) Annales Médicales de Nancy
Après la mort de Louis Spillmann, survenue en 1940, la formation de fondamentaliste et de clinicien acquise par Jules Watrin le fait apparaître comme le successeur qui s'impose. Interne de Spillmann en 1909, puis son premier chef de clinique en 1913, il s'oriente en même temps vers une carrière d'homme de science, se façonnant à l'école du laboratoire. Prosecteur d'Anatomie, il travaille également au Laboratoire d'Histologie, où il est l'élève d'Ancel et Bouin. L'Ecole nancéienne se distingue alors par ses travaux sur les glandes endocrines périphériques et l'hypophyse : sous la direction de ces maîtres prestigieux, J. Watrin soutient une très belle thèse sur l'histologie de la capsule surrénale au cours de la gestation. Après la guerre, il parvient encore à mener de front ses recherches scientifiques et sa formation médicale : chef de travaux d'Histologie en 1920, au laboratoire de Remy Collin, puis son agrégé en 1923, il est également devenu l'assistant de Spillmann et, en 1933, est chargé du cours de Propédeutique Dermatologique ; en 1938, il est nommé professeur d'Anatomie Pathologique ; trois ans plus tard, enfin, J. Watrin succède à son maître comme titulaire de la chaire de Dermatologie et de Syphiligraphie et chef de service hospitalier - fonctions qu'il assume jusqu'à sa mort, en 1955. Ses publications sont multiples et, conséquence heureuse de la double orientation de sa carrière, relèvent aussi bien de la recherche pure que de la clinique.
Ses études d'endocrinologie, qui représentent un important travail expérimental, concernent non seulement la capsule surrénale mais encore l'hypophyse et les glandes génitales. En même temps, la plupart de ses communications de dermatologie doivent au laboratoire de s'appuyer sur une très solide histo-pathologie. D'autre part, s'il poursuit l'action antivénérienne de son prédécesseur, la syphilis n'est plus pour lui l'objet prépondérant de son activité, et la meilleure part de celle-ci, somme toute, est requise par la dermatologie. Il s'intéresse tout particulièrement à la radiothérapie cutanée, alors débutante et dont on sait combien la manipulation peut être difficile et dangereuse. Vers la fin de sa carrière, il donne volontiers à ses publications une orientation de médecine générale, comme en témoignent les trois thèmes du VIIIe Congrès International des Dermatologistes et Syphiligraphes de Langue Française, qu'il organise et préside à Nancy, en 1953 : le lupus érythémateux aigu, les dermatomyosites et les géno-neurodermatoses. A ce rapide aperçu d'une féconde carrière, on mesure combien est profonde en J. Watrin la marque de l'expérimentateur et de l'histologiste qu'il fut avant de s'imposer comme dermatologue et anatomo-pathologiste. En définitive, n'est-ce pas à cette intime union du fondamentaliste et du clinicien que son oeuvre doit de laisser entrevoir les prémices d'une dermatologie plus scientifique et plus complète - plus moderne, en un mot ? Au surplus, le courage dont il fit preuve peu avant sa mort, son abnégation totale en faveur de son élève ont été à ce point admirables que celui-ci, devenu son successeur, manquerait aujourd'hui à la plus élémentaire reconnaissance s'il n'en portait ici témoignage.