` sommaire

Chirurgie cardio-vasculaire

 

par P. MATHIEU

 

les activités hospitalo-universitaires à Nancy (1975-2005)

 

Avec l’aide de R. FRISCH pour la rédaction du chapitre consacré à la Chirurgie Vasculaire.

 

LES ORIGINES : 1950-1974 A LA CLINIQUE CHIRURGICALE DU PROFESSEUR CHALNOT

 

La chirurgie cardio-vasculaire s’est développée à Nancy à L’Hôpital Central au sein de la Clinique Chirurgicale « A » dirigée par le Pr. CHALNOTjusqu’à son depart en retraite le 30 septembre 1974.

Pendant plus de 25 ans à la tête de ce grand Service Chirurgical très polyvalent, le Pr. CHALNOT engagera plus ou moins tous ses collaborateurs à s’investir dans la chirurgie du Thorax, des Vaisseaux et du Cœur : Jean LOCHARD, Roger BENICHOUX, Jean GROSDIDIER, Paul GILLE, Robert FRISCH, Philippe VICHARD, Philippe SOMMELET, Gérard FIÉVÉ et moi-même, avec l’aide de ses anesthésistes fidèles et dévoués : Jean-Marie PICARD et Nelly RENY.

Les années 1950 sont celles de la Chirurgie « à cœur fermé ». La première commissurotomie mitrale est effectuée en 1951 et près de 800 rétrécissements mitraux seront opérés de la sorte dans les vingt-cinq années suivantes ; anastomoses palliatives pour les « Enfants Bleus », fermeture des canaux artériels, 70 opérations de Craaford pour coarctation de l’aorte entre 1950 et 1965, et la Chirurgie Vasculaire se partage entre les sympathectomies et toutes formes de revascularisations artérielles directes dans les ischémies chroniques et les ischémies aiguës des membres qui représentent une partie notable des nombreuses urgences de ce Service.

En 1959 Robert FRISCH dote le Service du premier appareil fiable de Circulation Extra-Corporelle. La Chirurgie à « cœur ouvert » peut alors prendre tout son essor : correction des cardiopathies congénitales de l’enfant et de l’adulte, premier remplacement valvulaire (valve de Starr mitrale) en 1963.

Dès lors le Service du Pr. CHALNOT accentue franchement son orientation Cardio-Vasculaire : en 1962 nous publions à l’Académie de Chirurgie la première résection chirurgicale réussie en France d’un anévrysme disséquant de l’aorte thoracique. La même année nous réussissons à Nancy le premier sauvetage d’un anévrysme rompu de l’aorte abdominale et R. FRISCH implante par thoracotomie le premier électrostimulateur (Pace-Maker).

1963 : Sixième succès mondial et premier succès français de réparation chirurgicale d’une perforation septale post-infarctus.

1964 : Première résection française avec succès d’un volumineux anévrysme du ventricule gauche et premières embolectomies pulmonaire sous CEC.

1965-1966 : collaboration suivie avec l’équipe Neurochirurgicale de Jean LEPOIRE pour traiter sous hypothermie profonde des anévrysmes intracrâniens inaccessibles sans arrêt circulatoire. A la même époque, nous effectuons avec Claude PERNOTde nombreuses interventions de Damman-Muller chez les nouveaux-nés à gros shunts gauches-droits ; en 1970 notre série de soixante-dix « bandings » de l’artère pulmonaire est une des plus importantes en France.

1967 est l’année de la première homotransplantation cardiaque effectuée à Cape-Town par Chris BARNARD et des premiers pontages coronariens réalisés à Cleveland par René FAVALORO. A Nancy, nous effectuerons notre premier pontage coronarien dès la mise au point des coronarograpies sélectives par François CHERRIER en 1969, mais nous attendrons jusqu’en 1984 avec le « second souffle » des Transplantations et l’arrivée à Nancy de Jean-Pierre VILLEMOT pour démarrer le programme des Transplantations Cardiaques et Cardio-Pulmonaires.

Dès les années 1970 le Pr. CHALNOT a nettement réparti les tâches : Robert FRISCH développe la Chirurgie Carotido-Vertébrale qu’il emmènera à la Clinique Chirurgicale B en 1973, Pierre MATHIEU assume la Chirurgie Coronarienne, puis après le départ de Robert FRISCH toute la Chirurgie Cardiaque.

 

APRES 1974 : LA CHIRURGIE VASCULAIRE A L’HOPITAL CENTRAL

 

La Chirurgie Vasculaire s’était donc développée au Service du Pr. CHALNOT à partir des années 1956-1958, sous l’impulsion sutout de Robert FRISCH - chirurgien assistant puis Pr. Agrégé en 1963 -  il devait en faire par la suite son activité principale.

Reléguant les Sympathectomies de Leriche à leurs moins mauvaises indications (sauvetage de membres menacés en l’absence de possibilités de revascularisations « directes » en particulier dans les artérites graves les plus distales) il devait se consacrer particulièrement à toutes les techniques de rétablissement direct de la circulation artérielle défaillante.

C’était l’époque des endartériectomies, à ciel ouvert ou semi-closes, aidées d’instrumentations variées, dont aucune n’a résisté à l’épreuve du temps. Elles ont donné de nombreux succès immédiats qui ne se sont en général pas maintenus à long terme.

L’arrivée des prothèses en Dacron tricoté, progressivement améliorées, devait cependant rapidement faire éclater les possibilités et assurer des résultats plus durables parallèlement au développement des pontages à partir de veines saphènes internes.

En même temps il a fallu, avec le Dr. STEHLIN, radiologue, mettre au point (voire inventer) les techniques d’artério- et d’aorto-graphies nécessaires au diagnostic et au suivi. La création d’une installation d’artériographie, sur place, au sein même du service chirurgical a été un instrument très important du développement de cette chirurgie.

A partir de là, la chirurgie vasculaire nancéenne a pu se développer activement, dans ses différents domaines : les classiques pontages aorto-fémoraux, fémoraux superficiels ou plus distaux, le traitement des anévrysmes de l’aorte, et plus particulièrement la chirurgie des vaisseaux à destinée encéphaliques : carotides et vertébrales avec l’aide, pour l’exploration artériographique du Pr. Luc PICARD.

A noter quelques « premières » comme la première publication européenne à la Société de Chirurgie Thoracique et Cardio-Vasculaire de Langue Français de chirurgie  reconstructrice des vaisseaux supra-aortique en 1968, ou celle, avec le Pr. CHALNOT du premier cas européen d’embolectomie de l’artère mésentérique supérieure avec récupération totale d’un infarctus intestinal massif (1971).

A partir de 1974, le Pr. FRISCH prenant la chefferie de Service de Chirurgie B quittait la Chirurgie Cardiaque pour un gros Service mixte de Chirurgie Générale et Vasculaire où il se spécialisait personnellement dans la branche vasculaire avec une importante activité à recrutement régional.

A noter : la très grande expérience du Pr. FRISCH (plus de 300 cas) dans la chirurgie de désobstruction de l’ostium vertébral, parallèle à celle du Pr. THEVENET de Montpellier. Un laboratoire de formation à la micro-chirurgie ayant été créé, l’activité de traitement de l’insuffisance vasculaire cérébrale a pu être complétée par une petite série d’anastomoses extra-intra-craniennes temporo-sylviennes. Les résultats, sans aucune complication, furent assez décevants sur le plan fonctionnel et la technique abandonnée.

Ces techniques de micro-chirurgie vasculaire n’ont pas trouvé leur place en pathologie vasculaire, mais ont fructifié au Service pour des transplantations autologues dans la réparation de gros délabrements traumatiques musculo-cutanéo-squelettiques.

Reconnu par ses pairs dans sa spécialité, Robert FRISCH fut un des fondateurs de la Société Française de Chirurgie Vasculaire (Président du Congré National à Nancy en mai 1990) ainsi que du Collège de Chirurgie Vasculaire qui faisait de son service un des pôles de formation des jeunes dans ce domaine. De nombreux chirurgiens vasculaires confirmés en sont sortis, pour n’en citer que les principaux : Cl. AMICABILE, P. AUBRY, R. BERON, P. BOUR, Nicolas FRISCH, J.P. GENIN, Cl. MIHALE, Chr. MULLER (actuellement responsable avec Nicolas FRISCH du Département de Chirurgie Vasculaire de l’Hôpital Sainte Blandine à Metz).

A partir, des années 1980, les radiologues vont développer parallèlement à la chirurgie de pontage, les techiques de revascularisation par dilatations endovasculaires et celles-ci vont connaître au cours des années un grand développement grâce aux améliorations techniques des cathéters à ballonnets et à l’apparition des « stents ».

Ces techniques de radiologies interventionnelles, d’un intérêt capital en pathologie des coronaires ou en pathologie vasculaire intra-cranienne, ont été critiquées dans le domaine des artérites des membres inférieurs où l’indication d’un geste de dilatation, ou de levée d’une obstruction des artères périphériques, si elle n’est pas correctement corrélée à un besoin réel, expose par l’agression vasculaire créée, et malgré les progrès des stents, à une évolution globale dans le temps qui peut être plus péjorative que l’évolution spontanée.

Dans de bonnes indications, qui ne sont pas le « traitement d’une image », ces techniques ont cependant fait la preuve indiscutable de leur utilité. Et c’est précisement grâce à la collaboration établie à Brabois entre les radiologues interventionnels (J. FAYS) et l’équipe de Gérard FIEVE qui succède à Robert FRISCH à la tête du Service de Chirurgie Vasculaire que les techniques chirurgicales et les méthodes endoluminales se révèleront finalement bien plus complémentaires que concurrentielles.

C’est également dans le Service de Gérard FIEVE que seront mises en place les premières prothèses endovasculaires en traitement de certains anévrysmes de l’aorte abdominale et également de certains anévrysmes thoraciques récusés par les chirurgiens cardio-vasuclaires en raison de conditions générales ou respiratoires très médiocres considérées comme des contre-indications opératoires.

En dépit du rapprochement géographique des équipes à Brabois en 1990 et en dépit du soutien apporté par les chirurgiens cardio-vasculaires à la formation d’éventuels successeurs du Pr. FIEVE pour son départ en retraite prévu en 2003, les collaborations resteront épisodiques et peu fructueuses. Faute d’avoir pu former un PU-PH de Chirurgie Vasculaire, ce Service perd son autonomie en 2003 et l’activité de Chirurgie Vasculaire est alors directement rattachée à la Clinique de Chirurgie Cardio-Vasculaire et Transplantations.

 

APRES 1975 : LA CHIRURGIE CARDIO-VASCULAIRE A BRABOIS

 

L’éloignement géographique jusqu’en 1990 et d’inévitables problèmes humains ont provoqué ce divorce contre-nature entre Chirurgie Cardiaque et Chirurgie vasculaire, divorce qui s’est prolongé jusqu’au départ en retraite de Gérard FIEVE. Nous avons vécu à regret cette partition qui trouvait ses limites en pathologie aortique et qui ne pouvait s’appliquer à tant de pathologies mixtes, comme par exemple les nombreuses et délicates atteintes simultanées coronariennes et carotido-vertébrales, très fréquemment opérées en un seul temps opératoire en Chirurgie Cardio-Vasculaire.

Et nous avons d’autant plus déploré ce divorce que nous venions de vivre à l’Hôpital Central entre 1969 et 1975 une des périodes les plus exaltantes d’une symbiose cardiologique médico-chirurgicale particulièrement réussie : l’essor des coronarographies, la réalisation des premiers pontages aorto-coronariens, l’unité de lieu, la permanence des contacts entre coronarographistes et chirurgiens, la structure même des salles de cathétérisme et de la salle d’opération (la fameuse « salle rouge » avec sa survision) nous avaient permis d’établir les relations les plus étroites et les plus confiantes. Jamais l’entente n’avait été aussi totale entre cardiologues et cardiochirurgiens.

Après le déménagement à Brabois de la Clinique Chirurgicale A en 1975 – suivant de peu pourtant celui d’une partie des Services de Cardiologie – l’enfermement des chirurgiens dans un bloc opératoire étanche et fermé, l’éloignement des équipes hémodynamiques dispersées et lointaines, nous avons mesuré combien ces nouvelles structures avaient contribué à réduire la qualité des coopérations médico-chirurgicales.

C’est dans cette période que s’autonomise l’équipe de Chirurgie Cardio-Vasculaire :

- 1976 création d’un Secteur,

- Puis en 1977 création du Service de Chirurgie Cardio-Vasculaire avec 1 PU-PH et 3 Chefs de Clinique qui bientôt ne seront plus que 2, le troisième poste de CCA étant utilisé à créer une Unité de Réanimation de 7 lits bien distincts des 17 lits d’hospitalisation. Ce Service se sépare ainsi de la Clinique Chirurgicale A de Roger BENICHOUX qui deviendra un peu plus tard Service de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique.

Cette petite structure de Chirurgie Cardio-Vasculaire éclate aussitôt dans ses locaux trop exigus car avec l’essor de la chirurgie coronarienne, l’activité de chirurgie cardiaque va plus que doubler en quatre à cinq ans. Un Secteur d’hospitalisation partagé pendant quelques années avec l’Ophtalmologie de Brabois permet de limiter temporairement l’exode des candidats à la Chirurgie Cardiaque que cette structure ne peut accueillir. Malgré la nomination de Danièle AMREIN dans un poste de PH, l’équipe de Chirurgie Cardiaque réduite à un seul PU-PH et un PH ne peut faire face à cette explosion d’activité, d’autant plus que les vieux assistants chevronnés très sollicités hors du CHU se sont dispersés. Il faut donc former rapidement leurs remplaçants eux-mêmes très attirés en pratique libérale par une activité plus raisonnable et plus lucrative…

Malgré les difficultés, l’évolution des techniques est rapide. Il faut suivre. Cette équipe surmenée ne perd pied que dans le domaine de la Chirurgie Cardio-Pédiatrique et il faudra attendre l’année 2002 pour remettre en route ce domaine delaissé pendant 25 ans malgré l’investissement personnel particulièrement courageux de Danièle AMREIN.

Entre 1975 et 1980, la Chirurgie Cardiaque s’est profondément transformée : le développement de l’hypothermie sélective et des techniques de cardioplégie permet d’écourter les procédures chirurgicales et d’en renforcer la fiabilité. Les très lourdes techniques d’hypothermie profonde ne seront plus appliquées qu’au traitement des anévrysmes de la crosse aortique.

La chirurgie cardiaque « conventionnelle » submergée par l’afflux de la pathologie coronarienne suit les évolutions : la vieille prothèse valvulaire de Starr cède la place aux prothèses plates et bientôt aux valves à doubles ailettes plus fiables, les indications des bioprothèses se précisent, l’expérience acquise à LAËNNEC et Marie LANNELONGUE par Danièle AMREIN lui permet d’opérer en sécurité les cardiopathies congénitales du grand enfant et de l’adulte et nous corrigeons secondairement sous CEC les communications interventriculaires sévères que nous avons fait survivre en période néo-natale grâce aux « Bandings » de l’artère pulmonaire. Mais c’est surtout dans le traitement des sténoses coronariennes que notre équipe marque des points par rapport à toute la Chirurgie Cardiaque Française à l’exception de nos amis lyonnais qui, comme nous, se sont lancés dans la réalisation des fameux « pontages mammaires internes ». Ce n’est que quatorze ans après le début de notre pratique que la supériorité de notre option sera enfin publiquement reconnue, en raison des taux de perméabilité de nos pontages très supérieurs à ceux des pontages veineux saphènes : la publication en 1975 des résultats de nos cent premiers pontages mammaires figurera en 1985 parmi les 126 titres de communications retenues lors du cinquantenaire de la Société Française de Cardiologie illustrant au mieux « l’activité novatrice » et ce même travail sera retenu en 1987 par le Comité de Coordination de l’INSERM dans le domaine Cardio-vasculaire parmi seulement 24 titres des travaux les plus importants réalisés entre 1952 et 1985.

Si les résultats s’améliorent considérablement, c’est aussi et surtout grâce aux progrès de l’anesthésie (notre équipe de PH chevronnés vole au secours des chirurgiens débordés : HOTTIER, KIPPERT, THIRION, HUBERT, RETOURNARD…) et de la réanimation à laquelle se consacre sans jamais mesurer ses efforts Jacqueline HELMER en parfaite harmonie avec nos cadres infirmiers Marie-Antoinette CERF et Andrée BENOIT.

Les techniques médico-chirurgicales étant plus sûres, les cardiologues hospitaliers et libéraux nous confient donc des patients de plus en plus âgés et fragiles, d’autant plus que l’apport de la contre-pulsion diastolique vient considérablement renforcer l’arsenal pharmacologique pour passer les caps opératoires les plus périlleux.

Les interventions effectuées en urgence sont plus nombreuses, et bientôt l’équipe chirurgicale va « couvrir » les premières angioplasties endoluminales réalisées en hémodynamique par F. CHERRIER.

Il n’est plus possible d’aller plus loin, le bon sens de la Communauté Hospitalo-Universitaire finit par l’emporter : seul le renforcement de l’équipe chirurgicale va lui permettre de promouvoir de nouvelles activités et puisque c’est un assistant du Pr. CABROL qui est choisi, ce sera donc l’activité de Greffe Cardiaque et Cardio-Pulmonaire qui va bénéficier au premier chef de l’arrivée à Nancy de Jean-Pierre VILLEMOT en 1981 dans un poste de CCA et dans l’année qui suit dans un poste de PU-PH.

Ce staff chirurgical renforcé va progressivement bénéficier d’autres apports très substantiels en loca    ux (récupération de la totalité du deuxième étage de l’Hôpital de Brabois Adulte lors du transfert à l’Hôpital Central du Service d’Orthopédie de Jean-Pierre DELAGOUTTE) et en collaborateurs puisque des Cardiologues compétents vont remplacer dans l’équipe chirurgicale les stagiaires en formation des années passées : J.P. HOUPPE, J.P. GODENIR et A. HAOUZI. Avec eux l’échographie est disponible et fiable dans le Service pour la surveillance post-opératoire et bientôt au bloc opératoire permettant l’essor de ce qui va révolutionner la Chirurgie de l’Insuffisance Mitrale : même si nous avions effectué déjà des annuloplasties mitrales dès 1975, nous n’aurions jamais autant développé les Plasties Mitrales Reconstructrices sans le secours des échographies transoesophagiennes effectuées en salle d’opération : analyse précise du mécanisme de la régurgitation et de ses causes anatomiques guidant la complexité du geste réparateur et contrôle immédiat de la qualité de cette réparation.

L’équipe chirurgicale elle-même est plus étoffée : un second poste de PH est créé occupé successivement par PH. SEBILLOTTE, B. PEIFFER, G. PINELLI et B. SCHJÖTH.

Depuis le début, nous avions accueilli des stagiaires étrangers : brésiliens, chiliens, japonais, marocains, libanais, tunisiens et iraniens. La création des DIS va amplifier le flux et les missions internationales du Pr. VILLEMOT vont diversifier l’origine de ces stagiaires avec l’arrivée des chinois, des roumains et de toutes les régions du Mahgreb et du Moyen-Orient.

Jean-Pierre VILLEMOT a su dynamiser l’équipe qui va s’investir dans la réalisation des greffes. Ce qui implique la mise sur pied, très lourde mais parfaitement réussie, de la consultation des greffés qui assurera la surveillance indéfinie de cette population très attachée, bien sûr, à ceux qui s’y consacrent : d’abord Sophie MATTEI, très expérimentée dans ce domaine grâce à l’expérience acquise à la Pitié-Salpétrière, et toute l’équipe de Réanimation qui l’entoure.

Les progrès sont rapides : première greffe cardiaque en 1984, première assistance circulatoire en 1986, première greffe cardio-pulmonaire en 1988 et en 1989 première greffe monopulmonaire en collaboration avec l’équipe de Chirurgie Thoracique de Jacques BORRELLY. L’activité de transplantation cardiaque et cardiopulmonaire place ainsi l’équipe de Jean-Pierre VILLEMOT au troisième ou quatrième rang des équipes françaises. Cette réussite permet l’acquisition et l’implantation en 1993 du premier NOVACOR. Cet appareil très performant d’assistance mono ou biventriculaire va permettre aux patients en grave insuffisance cardiaque et en attente de greffon compatible disponible de survivre plusieurs semaines et même plusieurs mois et d’améliorer leur état à tel point qu’ils ont pu récupérer une véritable activité physique et finalement une telle autonomie que grâce au NOVACOR certains d’entre eux ont même pu regagner leur domicile.

Certes les difficultés ne manquent pas, la Réanimation de Chirurgie Cardio-Vasculaire portée pourtant à 14 lits est cruellement insuffisante provoquant de nombreux retards et des reports d’interventions malgré certains débordements dans la Réanimation Chirurgicale Jean-Marie PICARD.

Tous ces problèmes quotidiens ne ralentissent pas l’essor de la « Clinique de Chirurgie Cardio-Vasculaire et Transplantations » créée en 1998 et stimulée par la perspective de voir se concrétiser un jour le vieux rêve d’un Hôpital Cardio-Vasculaire à Brabois regroupant enfin l’ensemble des disciplines médico-chirurgicales de l’appareil cardio-circulatoire et la pratique de notre spécialité dans toutes ses composantes. Un partenariat avec la Chirurgie Vasculaire et l’Angéiologie en général est désormais possible au sein de cette Clinique et la collaboration avec tous les acteurs des thérapeutiques endoluminales se renforce : cardiologues, hémodynamiciens, radiologues et chirurgiens.

Certes nous ne nous sommes pas coupés des collaborations indispensables avec les autres spécialités chirurgicales : en témoigne la mise sur pied en 2000 à l’initiative de Jean-Pierre VILLEMOT du projet de Chirurgie Robotique Multidisciplinaire appliqué en Chirurgie Coronarienne et aortique dès 2001 mais encore plus indispensable en pratique pour les chirurgiens viscéraux : chirurgie urologique, digestive, endocrinienne.

Cette collaboration chirurgicale multidisciplinaire s’exprime aussi au plan universitaire dans le double domaine de la recherche et de l’enseignement.

Le laboratoire de Chirurgie Expérimentale créé dans les locaux neufs de la nouvelle Faculté de Médecine en 1975 à l’initiative de Pierre MATHIEU regroupait la quasi-totalité des Professeurs de Chirurgie dès son origine. Jean-Pierre VILLEMOT qui en a pris la direction y a initié de nombreux travaux de recherche expérimentale et c’est surtout à l’initiative de Jean-Pierre CARTEAUX que la communauté chirurgicale universitaire y a organisé depuis plusieurs années un enseignement chirurgical théorique et pratique très apprécié des jeunes internes et stagiaires étrangers débutants. Cette intiative pédagogique très heureuse a débouché en 2003 sur la création d’un DIU Nancy-Strasbourg « Leçons de Pratiques Chirurgicales » fréquenté par des stagiaires des cinq facultés du Nord-Est de la France.

Notons également dans le domaine de l’enseignement la création en 1999 par Pierre MATHIEU à la demande expresse du « Collège Français de Chirurgie Thoracique et Cardio-Vasculaire » des Séminaires Biannuels « France-Nord » d’enseignement de notre spécialité qui remportent chaque année un succès croissant.

La nomination de Loïc MACÉ dans le poste libéré par le départ en retraite de Pierre MATHIEU permet de relancer en 2002 l’activité de Chirurgie Cardio-Pédiatrique et de conforter ainsi en le complétant, le Service de Cardiologie Pédiatrique créé par Claude PERNOT puis dirigé après sa dramatique disparition par Anne-Marie WORMS et actuellement par François MARçON aidé de Gilles BOSSER et de Hugues LUCRON.

Cet ensemble Cardio-Pédiatrique ainsi que le groupement Vasculaire en voie de reconstitution ne sont finalement que parties prenantes du Pôle Cardio-Vasculaire animé par Etienne ALIOT et Jean-Pierre VILLEMOT, structure voulue par les directives gouvernementales actuelles et mises en place par la Direction Générale du CHU.

Ce regroupement inscrira donc dans les faits et dans la gestion hospitalière réelle les projets déjà anciens entamés dès les années 1975-1980 par Gabriel FAIVRE, Claude PERNOT et surtout Jean-Marie GILGENKRANTZ, iniateur du premier département Cardio-Vasculaire, repris en 1990 par Pierre MATHIEU, premier Coordinateur de la Fédération des Maladies Cardio-Vasculaires avec l’appui et la participation de François CHERRIER, Nicolas DANCHIN, Etienne ALIOT, Yves JUILLIERE, Anne-Marie WORMS, Jean-Pierre VILLEMOT et Gérard FIEVE.

L’équipe chirurgicale actuelle animée par 3 PU-PH : Jean-Pierre VILLEMOT, Chef de Service ; Jean-Pierre CARTEAUX et Loïc MACÉ et 2 PH temps plein : Danièle AMREIN et Bruno SCHJÖTH, avec la participation si active de ses PH d’Anesthésie-Réanimation : Sophie MATTEI, Christian DOPFF, Etienne HOTTIER, Michel CLAVEY, Thierry HUBERT, Jean-Marie PARLANTI, Marie HIRSCHI, Sandrine GROSJEAN, Amar SAMET et Oswin GROLLMUSS, n’est certes pas au bout de ses peines. Les trente dernières années ont été difficiles, les trente prochaines ne seront pas plus simples, et la construction cardiologique sur le site de Brabois imposera encore à cette équipe bien des efforts et des sacrifices.

Les années 1974-2004 lui ont permis de relever le triple défi qui se présentait à elle au début de ce trentenaire : le regroupement de tous les acteurs des disciplines Cardiaques et Vasculaires, le programme de Transplantations et le renouveau de la Chirurgie Cardio-Pédiatrique.

Gageons qu’en dépit de tous les obstacles, cette équipe saura relever avec succès les nouveaux défis qu’elle affrontera.